Débat n L'écrivain algérien Waciny Laâradj est revenu, hier, dimanche, au Caire sur la littérature de l'exil lors d'une conférence animée dans le cadre de la 40e foire internationale du livre du Caire. Enseignant de littérature maghrébine à l'université de la Sorbonne (France) et maître-conférencier du même module à l'université d'Alger, Waciny Laâradj a soulevé la problématique de l'exil dans la conception littéraire soulignant qu'il s'agit d'une transition volontaire ou obligatoire de l'écrivain de son environnement d'origine vers un autre espace géographique sous l'effet de conditions données. En tant qu'écrivain ayant vécu les douloureux événements qui ont marqué l'Algérie lors des années du terrorisme, Waciny Laâradj dira que l'exil avait, pour lui, une connotation tout autre. L'exil lui a, en effet, permis de transformer le nouvel environnement géographique en un espace de mémoire pour y inscrire les peines de son peuple et de son pays, a-t-il expliqué ajoutant qu'il n'avait, en réalité, jamais ressenti l'exil comme tel car il portait ses références et repères en lui-même. Il a précisé, par ailleurs, qu'il était «contraint» de s'exiler en France en 1994 sous la menace terroriste qui a tant ciblé les intellectuels que les différentes franges de la société algérienne. Fils d'un père tombé au champ d'honneur, le romancier algérien dit être imprégné des valeurs patriotiques et que le «cordon ombilical avec le pays n'a jamais été coupé». Lorsqu'un écrivain est arraché à sa terre natale, l'écriture devient pour lui un pays d'adoption et un canal à travers lequel il transmet les peines et les souffrances de son peuple. L'amertume de l'exil laisse des traces sur les écrits qui sont perçues par le lecteur. Le romancier algérien a évoqué la capacité de l'écrivain de transcender l'exil géographique forcé. La vie continue et vous porte vers la créativité et il n'est de tel pour un créateur que de transformer ce malaise existentiel en un facteur d'ouverture aux autres et d'en faire une source de perpétuelle création, estime Waciny Laâradj. Les périodes d'exil pour notre auteur ont ainsi été productives avec notamment La maîtresse des lieux, traduit de l'arabe en plusieurs langues, La gardienne des ombres, et Le miroir des aveugles, ce dernier édité en langue française. «Il s'agit de témoignages vivants de ce que j'ai vécu et de ce qu'a vécu mon pays», a expliqué Waciny Laâradj. C'est surtout le témoignage que la vie l'emportait sur la mort, dira l'auteur pour qui l'écrivain exilé ressent ce besoin de recréer l'espace géographique et territorial dont il est privé à un moment donné pour diverses raisons et sous moult contraintes. l Waciny Laâradj a obtenu en 2002 le prix du roman algérien pour ses romans Fleurs d'amandiers et Les balcons de la mer du Nord. En 2007, il reçoit le prix des Grandes Lettres des Emirats arabes unis pour Le livre de l'Emir paru aux éditions Dar El-adab de Beyrouth et consacré à l'Emir Abdelkader. Auparavant, en 2006, il avait rejoint Yasmina Khadra, Djamel Amrani et Maïssa El-Bey sur la liste des lauréats du prix des Bibliothèques algériennes. Il aura fallu quatre années de labeur et de recherches dans les différents écrits touchant à la vie de l'Emir Abdelkader (archives nationales, archives françaises et écrits et correspondances de l'Emir) pour cerner au mieux cette personnalité si prenante, a indiqué Waciny Laâradj.