Résumé de la 54e partie n Alvirah est invitée à la télévision pour participer à une émission ayant pour thème les ravages provoqués chez les gagnants de la loterie... Willy, pour sa part, ne s'accoutumait pas à être exposé aux yeux du public. Alvirah avait beau lui assurer qu'il était formidable et que tout le monde lui trouvait un air de ressemblance avec Tip O'Neil, le célèbre parlementaire, il n'était jamais plus heureux qu'avec une clé à molette à la main en train de réparer une fuite d'eau. Willy était un plombier-né. Comme toujours, Donahue commença l'entretien de son ton désinvolte, avec une pointe de scepticisme. «Comment imaginer qu'après avoir gagné des millions de dollars à la loterie, vous ayez besoin d'un groupe de soutien ? N'est-il pas stupéfiant que vous soyez ruinés alors que de gros chèques continuent à vous être versés ?» «In-cro-yable !» hurla docilement l'assistance. Alvirah rentra le ventre et saisit la main de Willy, mêlant ses doigts aux siens. Elle ne voulait pas avoir l'air nerveux à l'écran. Il y avait probablement une foule de parents et d'amis postés devant le petit écran. Sœur Cordelia, la sœur aînée de Willy, avait invité dans son couvent quantité de religieuses à regarder l'émission. Trois spectateurs au moins n'étaient pas des habitués de l'émission de Donahue. Sammy, Clarence et Tony venaient d'être relâchés d'un quartier de haute surveillance dans une prison près d'Albany où l'Etat les avait abrités pendant une douzaine d'années après leur attaque à main armée d'un camion de collecteurs de fonds. Malheureusement pour eux, ils n'avaient jamais eu l'occasion de dépenser leur butin de six cent mille dollars. Un pneu de la voiture dans laquelle ils tentaient de s'échapper avait éclaté à une rue de la scène du crime. Aujourd'hui, libérés de leur dette envers la société, ils cherchaient un nouveau moyen de s'enrichir. L'idée de kidnapper un membre de la famille d'un gagnant avait germé dans le cerveau de Clarence. Voilà pourquoi ils regardaient en ce moment-même l'émission de Donahue dans une chambre minable de l'hôtel Lincoln's-Arms, au coin de la Neuvième Avenue et de la 40e Rue. Tony, trente-cinq ans, était le plus jeune de la bande. A l'instar de son frère, Sammy, il était bâti comme une armoire à glace, avec des bras de lutteur. Ses petits yeux disparaissaient dans les replis de ses paupières tombantes. Son épaisse chevelure noire était hirsute. Il obéissait aveuglément à son frère et son frère obéissait à Clarence. Clarence offrait un total contraste avec les deux autres. Petit, sec, la voix douce, il avait quelque chose de glaçant. A juste raison, les gens s'en méfiaient instinctivement. Clarence était venu au monde dépourvu de conscience, et bien des meurtres restés inexpliqués auraient été résolus s'il avait parIé dans son sommeil lorsqu'il était en détention. Sammy n'avait jamais avoué à Clarence que la veille de l'attaque du camion, Tony avait fait une virée avec la voiture prévue pour leur fuite et roulé sur une chaussée couverte de débris de verre. Tony n'aurait pas vécu assez longtemps pour s'excuser d'avoir négligé de vérifier les pneus. (à suivre...)