Résumé de la 2e partie n Après la libération, Samuel va connaître quatre années de malheur. Il est finalement réexpédié chez lui et, dans le train, il voit son ami Jean-Marie qu'il croyait mort à la guerre… Dans le couloir, Jean-Marie le regarde fixement. Samuel remarque qu'il porte encore la capote vert-de-gris des troupes allemandes. «Pauvre Jean-Marie ! Il n'a pas trouvé de quoi se changer pendant toutes ces années. Dieu sait où il a pu les passer. Moi au moins, ils ont réussi à m'habiller presque comme un être humain. — Ne bouge pas, Jean-Marie, j'arrive ! Mais, avec le bruit du train en marche, Jean-Marie ne semble pas avoir entendu ce que Samuel lui crie. Samuel qui a du mal à se frayer un passage entre les autres voyageurs du compartiment. Tout le monde se déplace avec un maximum de bagages. Tout un capharnaüm de valises ficelées, de paquets et autres ballots. Jean-Marie regarde Samuel et il lui fait un petit geste du menton. Samuel reconnaît aussitôt cette mimique-là, elle signifie : Je passe devant, suis-moi !» «Bougre de Jean-Marie ! Ça te ferait mal d'attendre que je sorte au moins de ce foutu compartiment ! Tu ne changeras donc jamais !» Quand Samuel se retrouve enfin dans le couloir, Jean-Marie, à sa grande surprise, est déjà au bout du wagon. «Mais comment il s'y prend, le bougre ! Comment est-ce qu'il arrive à passer si vite parmi tous ces gens et leurs enfants, leurs valises ? Pourtant, il n'a pas maigri depuis le front russe.» Jean-Marie disparaît et s'engage dans le soufflet. Quand Samuel parvient à l'accordéon bruyant qui relie les deux wagons, Jean-Marie est au milieu du couloir du wagon suivant. Partout entre eux la même foule, les mêmes gens aux visages fatigués assis sur leurs valises. Samuel bouscule tout le monde. Il ne s'excuse même plus. Il bougonne : «Mais qu'est-ce qu'il a ? Il pourrait quand même m'attendre. Jean-Marie, sacrée bourrique ! A quoi tu joues ?» Enfin, Samuel parvient au bout du train. Mais Jean-Marie a disparu. Complètement. Le dernier soufflet, avant la locomotive, est hermétiquement fermé. Samuel crie en dialecte alacien : — Jean-Marie ! Où te caches-tu ? Il frappe sur la porte des toilettes les plus proches. La porte s'entrouvre. A l'intérieur, une brave mère de famille est installée avec deux mioches sur les genoux. C'est le seul endroit libre qu'elle ait trouvé pour voyager... Samuel revient sur ses pas. Devant chaque compartiment, il s'arrête un moment pour dévisager chaque voyageur. Parfois, il croit reconnaître un visage. Mais personne, en tout cas, n'est habillé en soldat de la Wehrmarcht : «Quelle drôle d'idée ! remarque à ce moment Samuel. C'est un coup à se faire lyncher !» Quand, complètement désespéré, il retrouve son wagon, il parIe à haute voix, mais personne ne semble y prêter attention : — Non, ce n'est pas vrai. Jean-Marie ! Tu ne vas pas me faire ça ! Pas maintenant ! Un train, sur l'autre voie, passé à grande vitesse. Puis un choc énorme jette tous les voyageurs pêle-mêle les uns sur les autres. Dans un enchevêtrement de valises et d'enfants qui braillent. Le train est arrêté. La panique s'installe. Samuel met près de trois quarts d'heure pour rejoindre le compartiment où il voyageait. Un groupe compact en bouche l'entrée. Et quand il parvient enfin jusqu'à la place qu'il occupait, il comprend soudain la raison de l'apparition de son cher Jean-Marie. Si le train s'est arrêté, c'est qu'il y a eu un accident. Le convoi qui voyageait en sens inverse était chargé de poutres de béton. Pour une raison inconnue, son chargement s'est déstabilisé et une poutre est venue éventrer la place que Samuel Gruber occupait. Il y a deux morts dans le compartiment. Si Jean-Marie Drolling n'était pas apparu de l'au-delà pour faire un signe à son copain, Samuel serait mort aussi.