V?ux «Se saisir de cette terre plus belle que la France non moins riche que celles d?Italie et d?Espagne...» Cela amène à confirmer, une fois de plus, que le coup de l?éventail n?était qu?un prétexte et que ce geste était celui que l?autorité coloniale attendait pour ne plus reconnaître les traités qui la liaient à l?Algérie, éviter le paiement des créances qu?elle lui devait et accentuer le processus d?invasion tenté en juin 1682 à partir des côtes algériennes et qui échoua après plus de six mois passés en haute mer aux environs de Cherchell. Dans son livre intitulée l?Etablissement des Français dans la régence d?Alger, M. P. Genty de Bussy souligne : «En entrant en Algérie, les Français allaient combattre les traditions, le climat, le pays.» Tout en commentant avec force détails le déroulement de l?invasion, l?auteur, qui était conseiller d?Etat, ajoute que mille v?ux dans ces temps-là s?élançaient vers Alger : «Se saisir de cette terre plus belle que la France, non moins riche que celles d?Italie et d?Espagne, sa colonisation avait été l?une des grandes pensées de Napoléon.» L?occupation permettait à la France de s?étendre, de se développer, surtout à cette époque où la situation sociale se dégradait de jour en jour. En parlant de la prise de Annaba, de Constantine, de Blida, de Mostaganem et de Tlemcen, de Bussy montra l?intérêt grandiose qu?il accordait au paysage. D?ailleurs, il le dit en ces termes : «De hautes montagnes dont le sommet est presque toujours couvert de neige, le territoire boisé, les plaines cultivées en blé, des oranges supérieures en grosseur à celles des Baléares et du Portugal, tout le bénéfice de ces spéculations tournera à l?avantage des colons.» Cela nous amène à souligner, une fois de plus, que les quelques essais relatifs à la recherche sur la musique en Algérie ont été effectués durant l?époque coloniale par de pseudo-écrivains animés par un subjectivisme aléatoire. C?est le cas de Daniel Salvador qui a prétendu être possesseur de 400 chansons recueillies en Espagne, en Algérie, au Maroc et en Tunisie. Or, son étude est d?une pauvreté déplorable. Les écrivains, qui comptaient s?inspirer de cette étude, ont été surpris par la maladresse et la stupidité de l?auteur qui avait ignoré les bases fondamentales de l?art d?un pays qu?il a pourtant habité. Le chercheur s?est permis de donner des indications erronées, alors qu?il avait toutes les chances d?approcher d?anciens chanteurs et musiciens qui professaient à cette époque. Il en est d?ailleurs de même pour Alexandre Christianovich qui, dans son esquisse historique sur la musique arabe, parue à Cologne (Allemagne), a négligé certaines règles de cet art, tout en avançant de faux témoignages. Or, il lui était facile d?aller directement aux sources surtout qu?elles étaient abondantes à travers tout le pays, avant que la colonisation ne les décime, comme elle l?a fait pour les autres secteurs. Nous saisissons cette opportunité pour noter que la plupart des auteurs occidentaux de l?époque, dans le but de porter atteinte à la dignité, à l?authenticité de l?histoire et à la civilisation arabo-musulmane, lient l?appellation corsaire à celle de pirates qui s?acharnaient à attaquer les bateaux européens et à les vider de leur chargement et de leurs passagers. Or, si l?on s?intéresse de plus près à la question, on remarquera que la réalité est tout autre. Car après la chute de l?empire andalou, certains pays européens se sont refait une santé, leur marine devenue plus entreprenante, ils n?ont pas manqué de commettre ce type de brigandage et là, on rappellera que la ville italienne de Livourne avait acquis, à cet égard, une triste célébrité.