Découverte Chassée par sa tante à La Calle, Nadia rentre chez elle à Machroha. Malgré tous ses efforts, elle n?arrive pas à cacher son état à sa mère. De guerre lasse, épuisée, Nadia avoue. Le visage de sa mère se décompose. Elle rougit brusquement puis pâlit, ses yeux se remplissent de larmes. Elle lâche les bras de sa fille qu?elle maintenait fermement, et se frappe la tête et le visage. ? Mon Dieu ! mon Dieu ! Quel malheur ! Qu?allons-nous faire ? Ton père et ton frère vont nous mettre dehors toutes les deux, toi pour ton forfait, et moi parce que je n?ai pas su t?élever ! Malheur à toi, Mebarka, et elle frappe son front de plus belle. Puis elle se jette à terre, les jambes écartées et se tape sur les cuisses d?un air désespéré, pleurant, balançant la tête à droite et à gauche. Nadia, glacée, reste debout près du lavabo, sans dire un mot, la regardant d?un air absent. Puis Mebarka se lève, lui prend à nouveau le bras et lui dit : ? Qu?e vas-tu faire ? Et qui est ce salaud, ce fils de chien qui t?a déshonorée ? Hein ? Réponds ? ? C?est un voisin de mon oncle? Il m?a juré qu?il allait venir me demander en mariage? ? Et pourquoi ne l?a-t-il pas fait ?? Tu lui as parlé de ton état ? Quel âge a-t-il ? ? Tu sais où il habite ? Nadia, devant toutes ces questions, reste sans voix, regardant sa mère de ses yeux agrandis par la terreur. ? Je te parle ! dit cette dernière, dis-moi tout ! Et elle lui raconte son aventure avec Salem, coupant de temps en temps ses phrases en assurant : ? Il m?a juré qu?il allait demander ma main, il en a parlé à son père et à sa famille ! ? Tais-toi, malheureuse, chienne ! tais-toi ! Tu oses prendre sa défense? Mais c?est ta faute avant tout ! C?était à toi de sauvegarder ton honneur ! Malheur à toi, Mebarka. Et elle se frappe à nouveau la tête. ? Ton père va me quitter, ton frère va te tuer, et je vais laisser mes enfants et ma maison ? Malheur à toi, Mebarka ! Nadia pleure maintenant à son tour devant l?énorme gouffre qui semble s?ouvrir devant elle et devant sa mère. Au bout d?un moment, cette dernière se tait, et semble se calmer. ? Ecoute ! Il faut faire quelque chose ! Personne ne doit apprendre la vérité. Personne. Les voisins? Et Mebarka fait encore une horrible grimace? Attention aux voisins, ils seront contents, ton père va être la risée de la ville, tu l?as déshonoré ! Bon, ajoute-t-elle, je vais réfléchir au moyen de te tirer de là, pas pour toi, fille indigne, mais pour moi et pour mes enfants, et pour garder l?honneur de ton père et ton frère sauf ! Et elle sort, après s?être ajustée, et avoir rafraîchi son visage rougi. Mais Mebarka est trop faible de caractère pour faire quoi que soit, pour aider sa fille, partiellement soulagée de partager son malheur. Jour après jour, elle attend une décision, une idée de sa mère pour les sauver n?osant aborder le sujet la première. En vain. (à suivre...)