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Quo Vadis ? (Où vas-tu ?)
Publié dans Info Soir le 09 - 08 - 2008

Interrogations n Quelle mouche a piqué certains Algériens pour vouloir, coûte que coûte, fêter St Valentin ? Et d'abord savent-ils qui il est et surtout pourquoi on lui dédie chaque année, au mois de février, une journée spéciale ?
Avant d'être canonisé par l'église catholique, Valentin n'était qu'un moine d'Abbaye que rien ne disposait à devenir un jour le culte que l'on connaît aujourd'hui.
A notre connaissance, son seul sacerdoce et son seul courage a été de tenir tête à l'église et de marier contre l'avis du pape deux amoureux transis qui éprouvaient toutes les peines du monde à divorcer de leurs conjoints respectifs.
Il n'en fallait pas plus, à l'époque où le boucher était la seule réponse que l'on pouvait apporter à l'hérésie pour faire entrer l'homme en soutane directement dans la légende.
Depuis, et en souvenir d'un épisode qui a dû énormément marquer les esprits d'alors, la St Valentin est devenue, au fil des ans, la fête de l'amour et, par extension, celle de la drague…
Ce jour-là, un peu partout en Europe et peut-être plus spécialement en France, les amoureux timorés ou indécis prennent leur courage à deux mains et déclarent enfin leur flamme à l'objet de leur désir.
C'est dans leur tradition, c'est dans leur culture. Très attentifs à tout ce qui se passe dans l'hexagone, de nombreux jeunes poussés autant par leur passion que par un mimétisme débile, ont pris l'habitude, depuis ces deux dernières années, d'acheter des roses à la St Valentin et de les offrir à leur fiancée ou à leur dulcinée en signe d'attachement indéfectible.
Quelques-uns, toujours prompts à faire plus et mieux que tout le monde, pousseront le bouchon de la bienséance jusqu'à publier des encarts publicitaires dans les journaux en guise de supplique ou de poème pour attendrir le cœur de leur promise. L'intention est peut-être sincère de part et d'autre, mais ce déballage de linge rose en public a quelque chose de choquant même s'il permet de raffermir autour d'une crème chantilly les liens distendus des uns et biscornus des autres.
Mais il faut croire que les Algériens éprouvent une véritable fringale pour les fiestas jusqu'à la boulimie.
Et quelle meilleure source de référence que le calendrier grégorien ?
Et c'est ainsi que de la St Valentin à la fête des mères ils n'ont eu qu'un petit pas à franchir. Allégrement. Une fois de plus, le mimétisme aveugle et bête va jouer à fond la caisse c'est à qui offrira ce jour-là le meilleur cadeau ou le plus beau bouquet de fleurs à sa mère.
Parfois, les enfants se cotisent pour acheter un présent collectif, l'occasion de se réunir et de dire entre deux morceaux de texte combien ils aimaient leur maman. Le tableau est peut-être attendrissant mais il sonne complètement faux de la toile en chevalet.
Car comment peut-on chérir sérieusement sa mère une fois l'an, à une date bien précise et bien déterminée par l'almanach ?
N'y a-t-il pas d'autres moyens pour le lui prouver ? Un petit geste, une petite attention, un sourire même font parfois l'affaire.
Et puis, l'affection que l'on porte à une mère est pérenne par nature inoxydable. Elle est innée, ne se commande pas, n'obéit à rien, sinon aux pulsions du cœur. Elle n'a besoin ni de tribune pour être proclamée, ni de chantre pour être déclamée à heure fixe et au jour prescrit. Il ne faut pas perdre de vue qu'en plus de la fête des mères qui permet à certaines familles de faire exceptionnellement la nouba, nous avons aussi piqué dans le répertoire européen des «javas», les fêtes de Noël que nous avons amputé de la dinde, des truffes, du foie gras et des coquilles St Jacques qui vont avec. Nous n'avons conservé finalement que la bûche au chocolat. Pratique pour une soirée télé au thé brûlant surtout quand il fait cinq degrés dehors.
Et après tout, la bûche est une pâtisserie comme une autre. Mais, croisons les doigts quand même pour que les prochaines générations ne fêtent pas aussi Halloween. Une fête américaine qui veut que les enfants portent des masques d'horreur et fassent du porte-à-porte pour réclamer des bonbons.
Ce jour, s'il venait à se concrétiser, nous aurions certainement dépassé le mur du son et de l'avoine.


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