Epreuve n Les malades sont transportés sur des civières appelées zkakares par les habitants de la localité, pour arriver à Tamloul, où se trouve le centre de santé. «Si on ne trouve pas de véhicule là-bas, on continue jusqu'à Menaceur. Nous avons eu à transporter les dépouilles de 3 victimes de terrorisme en tracteur de Menaceur vers notre douar faute d'accès», révèle El-Hadj Ahmed dont la famille vit dans ce douar depuis 1930. Et d'ajouter : «Nous savons que la loi stipule que toute unité de soins est ouverte pour un nombre déterminé d'habitants. Nous voulons, donc, notre dispensaire à nous car nous sommes obligés de nous déplacer sur 3 km pour nous faire soigner.» Son épouse, Khalti Fatma, 51 ans, en paraît 60. Elle a mis au monde 5 enfants avec césarienne. Elle a beaucoup souffert et son mari avec elle. «Je l'ai déjà transportée sur une civière que j'ai confectionnée moi- même et je ne suis pas le seul à en avoir fabriqué. Actuellement j'ai un véhicule et j'ai fait don de cet outil essentiel dans le sauvetage des vies humaines, lorsque l'oued est en crue et grâce auquel on fait traverser le malade vers l'autre rive pour le transporter en voiture vers l'hôpital. Nous avons déjà perdu des vies humaines. D'ailleurs le cimetière est plus proche, pour nous, que l'hôpital», ironise El-Hadj Ahmed. «Je souffrais de douleur et je croyais que j'étais déjà décédée quand j'avais constaté qu'on me transportait sur une civière», témoigne la brave femme. «La construction d'un pont est une urgence. La protection civile ne peut même pas arriver jusqu'à notre douar. Pourtant on nous a promis, lors de la campagne électorale, de régler ce problème dès l'année 2008. On est à la fin de l'année et nous n'avons rien eu», se désole cet homme qui fait part du vœu des habitants de bénéficier de projets à l'instar des douars voisins tels que Ferdjoune et Bouharbe qui relèvent de la même commune. Pourtant, signale-t-il, les habitants ont consenti beaucoup d'efforts que ce soit pour défendre le douar durant la période de terrorisme ou pour acheminer l'eau de source vers les maisons et les terres agricoles sur 8 km. Khalti Khadidja qui croit avoir 63 ans, est mère de 12 enfants. Elle révèle que la femme met au monde ses enfants à domicile par peur de l'accès difficile et fatiguant vers l'hôpital. La plupart des filles de Aïfer sont analphabètes. Elles ont quitté les bancs de l'école volontairement, pour certaines, ou sous la pression des parents pour d'autres. Cela, à cause principalement de l'état de la route menant vers Temloul où se trouve l'école primaire. «Nous sommes obligés à chaque fois de faire traverser l'oued à nos enfants sur nos dos. Mais que doit faire celui qui va à son travail plus tôt que ses enfants ou ceux qui n'ont personne pour les faire traverser ? Et puis, nous ne pouvons pas laisser nos filles sortir seules tôt le matin et aller loin de leurs domiciles», explique un citoyen. «Je n'ai jamais mis les pieds dans une salle de classe. Je ne sais ni lire ni écrire. L'école est loin, donc j'ai préféré rester à la maison», avoue timidement avec l'accent chelhi, la jeune Malika, 25 ans, qui était réticente au début à accepter la discussion. «Je suis bien à la maison. Je n'ai jamais aimé el djamaâ (l'école) car je voyais les autres souffrir et prendre des risques à cause de l'oued. J'ai toujours eu peur de l'oued », ajoute-t-elle.