Résumé de la 12e partie n Lynn reproche à son grand frère de l'avoir abandonnée en allant vivre loin d'elle... Mais elle a parlé la première : — Est-ce que tu te rappellerais, par hasard, combien de cartes postales j'ai reçues de mon grand frère, pour Noël ou pour mon anniversaire, après qu'il est parti à l'armée puis en Californie ? Moi, qui étais allé jusqu'au bout de cet hémisphère et en étais revenu, qui avais servi mon pays et quelques-unes de ses grandes entreprises, j'étais maintenant effondré sur mon siège, rouge de honte et d'humiliation. — Non. Je ne me le rappelle pas. — Ah, bon ? a-t-elle rétorqué. C'est pourtant un tout petit nombre. Il y en a eu trois, exactement. Et voilà. Toutes ces années à grandir, à traverser l'adolescence, à découvrir le monde toute seule, et personne pour me protéger – mon grand frère, mon Jason, était trop occupé pour écrire, pour appeler, pour prendre de mes nouvelles. Alors, si tu t'imagines que tu peux réapparaître tout d'un coup, avec l'air ravi et la bouche en cœur du type qui rentre chez lui... On n'en est plus là. — Lynn, écoute, je sais que je n'ai pas été le meilleur des frères, mais je... La radio s'est remise à crachoter. «N'en parlons plus», a-t-elle dit en faisant demi-tour pour repartir vers le centre de Porter. Il était un peu plus de deux heures du matin, il y avait longtemps que les bars étaient fermés et que les ivrognes étaient rentrés chez eux, tant bien que mal. Il bruinait légèrement et nous avons longé des rues désertes avant de nous arrêter devant un pâté de mai-sons au rez-de-chaussée occupé par des boutiques et des petits restaurants. Lynn n'a pas pris la peine d'éteindre le gyrophare, se contentant de garer la voiture en laissant le moteur tourner. Alarme silencieuse d'un magasin de jouets, a-t-elle expliqué en saisissant la torche et en se coiffant de sa casquette. La fausse alerte par excellence. Qui aurait l'idée de dévaliser un magasin de jouets ? — Qu'est-ce que tu vas faire ? M'assurer que les portes sont bien fermées et transmettre au commissariat. Il arrive que ces alarmes sonnent sans raison quand le temps est humide. Et si ça se trouve, il a suffi du passage d'un camion pour que les vibrations déclenchent celle-ci. J'en ai pour une seconde. Elle est sortie sous la bruine, sa torche électrique à la main, et s'est dirigée vers le magasin distant de trois ou quatre mètres. Pour régler ce petit problème. Et combien de temps pour régler le petit problème qui se posait à nous cette nuit-là, celui de la petite sœur prête à me tomber dessus à coups de matraque tellement elle m'en voulait ? Voilà à quoi je pensais quand j'ai regardé à travers le pare-brise, juste à temps pour voir ma sœur cadette, se faire descendre. Ils étaient deux et ils avaient jailli d'une porte voisine du magasin de jouets, la porte d'une bijouterie, pour rejoindre en courant une voiture garée un peu plus loin en emportant quelque chose dans leurs mains, quelque chose qui luisait – des armes ! (à suivre...)