Résumé de la 11e partie n Lynn et Jason vont à la rescousse d'un autre policier dans un bar où une dispute a éclaté... J'ai frissonné. Il s'en était fallu de peu, et quelque part, dans le tréfonds de son esprit, ce gamin savait, lui aussi, qu'il s'en était fallu de peu. On a très vite jeté à l'arrière de la voiture les deux gars qui étaient à plat ventre sur le trottoir et, le rideau étant retombé sur ce divertissement urbain, les gens ont commencé à se disperser pour rentrer dans le bar ou s'éloigner. Je suis retourné à la voiture. Lynn m'a rejoint, en s'essuyant le front avec une serviette de table, et a lâché quelques gros mots devant l'état du siège inondé de café. — Quelle alerte ! ai-je dit. — Oh, c'est classique, surtout quand on sait la quantité d'alcool qui se consomme pendant un week-end comme celui-ci, a-t-elle répondu. Tu vois, je ne suis pas pour la prohibition, mais si les gens savaient combien de vies nous voyons, nous, détruites par l'alcool qu'on boit pour s'amuser, en toute légalité, ils n'en reviendraient pas. Je dirais que les deux tiers de ceux qu'on va coffrer cette nuit seront ivres. Et je ne parle pas des accidents de voiture, des noyades accidentelles et des bagarres conjugales, tout ça alimenté à l'alcool. — Ce type aux cheveux orange m'a paru bien bourré, ai-je dit. — Comme d'habitude. C'est une grande gueule, et rien de plus. — Dis donc, Lynn-Lynn, je ne sais pas si tu t'en es rendu compte, mais au moment où tu te retournais il a mis les mains sous son sweat et j'ai cru qu'il voulait prendre un couteau, ou un truc comme ça. A trois secondes près, il a failli avoir de gros ennuis. On avait repris la Route 1 et on roulait à 110, nettement moins vite qu'à l'aller, mais j'ai vu Lynn se crisper. Quelques longues secondes se sont écoulées, dans le silence, puis elle a dit : — Ne fais plus jamais ça. — Mais, Lynn, c'était un pur réflexe. J'ai pensé qu'il allait... — Pas ça, idiot. Ne m'appelle plus jamais Lynn-Lynn. Il y a longtemps, très longtemps que tu n'en as plus le droit. Je n'ai d'abord rien trouvé à répondre, puis j'ai dit : — Oh, Lynn, ce n'est qu'un petit nom. Toi tu m'appelais Jay-Jay, et je... Elle avait les lèvres pâles et serrées. — Oui, je sais. Jay-Jay et Lynn-Lynn. Le grand frère et la petite sœur. Très mignon, très gentil. Sauf que tu as oublié les règles. — Quelles règles ? Elle m'a fusillé du regard. — Bon sang, la règle qui dit que les frères et les sœurs ne se laissent jamais tomber ! La règle qui dit que les grands frères veillent sur leur petite sœur, et que les petites sœurs admirent leur grand frère ! La règle qui dit qu'on ne perd jamais le contact, parce que c'est facile de briser un cœur de petite sœur, et qu'il ne se répare jamais, jamais ! Je ne pouvais pas la regarder. J'ai fixé le paysage de Porter qui défilait à toute allure, et je me suis raclé la gorge. (à suivre...)