Repère n «Les jeunes, tout comme leurs parents d'ailleurs, ont trouvé refuge et consolation dans le chaâbi et dans les textes d'El-Anka», dira Mohamed Bouhamidi, journaliste. Pourquoi donc le chaâbi est aussi populaire ? pour répondre à cette question, il nous faut revenir aux racines et à l'histoire de ce genre de musique. Le chaâbi a été «importé» d'Andalousie et implanté au Maghreb grâce aux Maures et aux juifs sépharades expulsés de Grenade, Séville et Cordou, lors de la Reconquista en 1492 . A cette époque-là, la musique andalouse n'était écoutée et comprise, que par les rois et les notables, avec des rituels, des cérémonies et sous forme de poèmes, les petites gens, n'y avaient pas droit. «Avant, il y avait des qaçaide qu'on utilisait 15 jours avant le Mouloud, en allant de mosquée en mosquée, et chaque mosquée avait sa "qacida", récitée sous forme de medh, comme le faisait cheikh Bennoubia, muezzin de Djamàa jdid... et puis, on animait les mariages et les fêtes, dans les maisons à la Casbah, avec les hommes en bas et les femmes au balcon, d'où fusaient les youyous, ainsi que dans les salles de spectacles, comme l'Alhambra ou l'Opéra, étaient interdites aux Arabes, donc on allait veiller dans les cafés...», dira Ahmed Serri. Et à Cheikh Zoubir d'enchaîner : «Oui on allait dans différents cafés, comme le Café des Sports, le Cercle du Mouloudia, le café Malakoff, le café de la Liberté, le café de Ababsa, le café Shanghaï, le café Ismaïlia ou encore le Tantonville, pour écouter les Anka, Ababsa, El-hadj Mrizek, Farid Oujdi...» , et c'est donc à partir de là, que monsieur «Tout-le-monde», pouvait enfin avoir accès à ce genre de musique, chanté par des gens qui étaient en général, d'origine modeste, avec des «petits» métiers la journée, et convertis en maître de cérémonie le soir ; c'est ainsi, que le chaâbi est devenu "LA" musique populaire par excellence. Il est donc acquis, que le chaâbi est issu des «m'dih» andalous puis m'dadha, auxquels El-Hadj M'hammed El-Anka a ajouté quelques instruments supplémentaires, tels que le banjo, le mandole, le piano et la cithare (el-qanoun), un peu plus tard. Peut-on dès lors parler de la modernisation du chaâbi par El-Anka ? En effet, une polémique intellectuelle d'amateurs de musique, de poètes et d'historiens, est née à ce sujet. Certains disent, que «oui», El-Anka a modernisé le chaâbi en y ajoutant des instruments, donc une nouvelle musique... d'autres, en revanche, diront que El-Anka a créé «le chaâbi», tout simplement, puisque ce genre n'existait pas avant, tout comme l'appellation d'ailleurs, et à ce propos, Abdelkader Chercham nous dira : «El-Hadj M'hammed El-Anka, n'a pas modernisé le chaâbi, il l' a juste structuré et lui a donné des bases...»