Excès n La mentalité singulière, qui nous colle presque tous à la peau, peut prendre de très graves dimensions. Les statistiques sont formelles : le nombre de morts et de blessés chaque année sur les routes est en perpétuelle augmentation. C'est l'hécatombe dans tous les sens du mot. Ni «tarik essalama», ni les appels à la prudence, ni même les sanctions pénales et correctionnelles n'ont réussi à juguler le phénomène et à assagir des chauffeurs de plus en plus inconscients derrière leur volant. Mais au lieu de chercher les causes à la source, c'est-à-dire dans le comportement de l'Algérien lui-même, nous sommes allés en guerre, pêle-mêle, contre des textes, nous avons accusé le code, la qualité de la formation dans les auto-écoles, le niveau de certains formateurs... Tous, bien sûr, ont une part de responsabilité, il ne faut pas le nier – mais c'est le rapport de l'Algérien au volant qui est le plus à blâmer. Combien de morts et de blessés n'a-t-on pas dénombrés la nuit sur les routes parce que des automobilistes inconscients circulaient sans feux, tous phares éteints ? Combien de morts et de blessés n'a-t-on pas enregistrés sur l'asphalte parce que des chauffeurs dans le cirage éthylique, conduisaient dangereusement au mépris de la prudence la plus élémentaire ? Combien de morts et de blessés n'a-t-on pas comptabilisés à la morgue ou sur un lit d'hôpital parce des pilotes bourrés de psychotropes avaient décidé ce jour-là de confisquer la route, qu'elle fût trempée, en piteux état ou truffée de virages dangereux ? Jusque-là, les automobilistes algériens ressemblent à tous les automobilistes du monde. Ce qui fait en réalité leur différence, c'est leur témérité caractérielle sans pareille ailleurs. L'Algérien, par exemple, est capable de conduire dans un sens interdit, en plein jour et en pleine lumière et peu lui importe le policier en faction qu'il est capable de bluffer avec un incroyable aplomb. Il est capable de faire des pieds et des mains pour récupérer son permis de conduire, retiré quelques heures auparavant et repasser par z'kara à bord de sa voiture devant le policier qui l'avait verbalisé. Cette mentalité singulière qui nous colle presque tous à la peau peut prendre des dimensions beaucoup plus graves. Les deux anecdotes que nous allons vous raconter sont non seulement authentiques mais elles renseignent à l'évidence sur la complexité de cette boule de nerfs que sont la plupart des Algériens. N'ayant pas retrouvé sa place habituelle dans le parking non loin de chez lui, un automobiliste n'a pas trouvé de meilleure leçon à donner à l'indu occupant que de lancer sa propre Mercedes toute neuve sur le véhicule incriminé. Résultat : des dégâts matériels importants de part et d'autre et une douzaine d'intermédiaires de bonne volonté pour ramener la paix entre les deux protagonistes. Mais il y a plus grave encore et qui renseigne, si besoin est, sur la complexité du tempérament des Algériens et leur caractère tranché dans le vif. Il y a quelques mois, un fourgon J9 était bloqué dans une rue étroite à cause d'un véhicule léger dont la propriétaire n'en finissait pas de dire au revoir à sa famille sur le trottoir. Après avoir longuement klaxonné à la jeune fille pour qu'elle dégage la ruelle et laisse passer le chauffeur excédé par tant de flegme et tant de sans gêne d'une famille qui n'avait cure de ses appels, le pilote fera alors marche-arrière et lancera son bolide qui tuera le père de la conductrice sur le champ. Le reste appartient désormais à la justice.