Le film La teta asustada de Claudia Llosa, bouleversante évocation des viols au Pérou pendant les affrontements politiques des années 1980, a remporté l'Ours d'or d'une Berlinale où ont triomphé les jeunes talents et l'Amérique du Sud, hier soir. Le jury présidé par l'actrice écossaise Tilda Swinton l'a sacré à l'unanimité. Le film raconte l'histoire d'une jeune femme dont la mère a été violée pendant les combats entre l'armée et la guérilla maoïste du Sentier lumineux, et qui souffre d'un mal mystérieux, «la teta asustada» (littéralement «le sein effrayé») transmis par le sein maternel. Cette production hispano-péruvienne qui exalte l'imaginaire de la culture indienne a vivement ému au 59e Festival international du film de Berlin, dont la sélection était plutôt terne. Ancien griot, le Malien Sotigui Kouyaté, 72 ans, a fait montre de ses talents de conteur en ponctuant d'un discours fleuve son Ours d'argent du meilleur acteur pour London River du Franco-Algérien Rachid Bouchareb, qui l'avait déjà dirigé dans Little Senegal en 2001. Dix-huit films étaient en lice, et les autres prix sont presque tous allés à de jeunes talents. L'Autrichienne Birgit Minichmayr, 31 ans, a été distinguée d'un Ours d'argent pour son rôle dans Tous les autres, portrait tragi-comique d'un couple signé par l'Allemande Maren Ade, dont le film a reçu le prix du jury. De son côté, l'Iranien Asghar Farhadi, 36 ans, a remporté l'Ours d'argent du meilleur réalisateur avec About Elly, où la jeune bourgeoisie de Téhéran joue avec les codes sociaux imposés par l'Islam. Véritable héros de la soirée, l'Argentin Adrian Biniez, 34 ans, a raflé trois prix avec Gigante, le portrait insolite et drôle d'un veilleur de nuit de supermarché qui, sous un physique menaçant, cache une âme sensible. Il a reçu le prix du jury décerné également à Tous les autres, celui du meilleur premier film et le prix Alfred-Bauer.