Deux frères avaient coutume de chasser ensemble et ne revenaient jamais bredouilles. Mais le gibier vint à manquer. Comme ils n'avaient plus grand-chose à manger, les deux hommes maigrissaient à vue d'œil. Un soir où ils rentraient sans avoir tué le moindre gibier, les chasseurs trouvèrent deux œufs, non loin du fleuve. Le puîné préféra attendre, car il savait qu'un œuf ne suffirait pas à calmer sa faim. Le lendemain, les deux hommes furent à nouveau bredouilles et ils trouvèrent encore deux œufs. L'aîné en mangea un. Le puîné garda l'autre. Il en fut ainsi durant toute la semaine. Le puîné, qui se contentait chaque jour des fruits qu'il trouvait, posséda bientôt sept œufs. Le matin du huitième jour, il eut l'agréable surprise de constater que ses œufs venaient d'éclore. Il était donc en possession de sept poussins qui grandirent rapidement. Six d'entre eux devinrent des poules. Et le septième un coq. Très vite, les poules se mirent à pondre et le puîné dut construire un grand poulailler pour abriter toutes ses volailles. Il cessa alors d'accompagner son frère à la chasse pour se consacrer exclusivement à l'élevage des poulets. L'aîné ignorait tout de cet élevage. Et il était surpris que son frère pût l'inviter à dîner chaque fois qu'il rentrait bredouille de la chasse. Un soir, n'y tenant plus, il décida de le questionner. — Comment te procures-tu tout ce que tu m'offres à manger ? demanda-t-il. Le puîné sourit et garda le silence. — Tu ne veux pas répondre ? reprit son frère. — Si ! dit le puîné. Mais, avant je souhaiterais te poser à mon tour une question. — Je t'écoute. — Il y a quelques mois, nous avons trouvé des œufs. Qu'as-tu fait des tiens ? — Je les ai mangés ! s'exclama l'aîné. — Tu les a mangés ! Mais moi, j'ai su garder les miens. Et grâce à mes sept œufs, je possède aujourd'hui un poulailler. Quelques petits sacrifices sont parfois nécessaires pour préparer l'avenir. — Tu as raison, dit l'aîné. Il abandonna à son tour la chasse pour travailler avec son frère. Et tous deux s'enrichirent rapidement.