C'est ce qui ressort d'une étude prospective réalisée par le Centre mondial de consulting économique, qui indique en outre que le taux de personnes ne lisant point est de 56,86%. Dans une intervention au premier colloque national sur «La réalité et les perspectives de la lecture en Algérie», le directeur du centre, Abdallah Bedaida, a précisé que ces statistiques découlent d'un sondage mené auprès de 1 000 personnes au niveau de 10 wilayas du pays et visant à faire la lumière sur la crise de la lecture en Algérie qui révèle, estime-t-il, «une absence quasi totale» d'intérêt du citoyen algérien pour la production intellectuelle et culturelle algérienne ou étrangère. Les résultats de cette enquête, souligne M. Bedaida, font ressortir que 16% des personnes interviewées lisent des livres religieux, 9% des livres d'informatique et d'économie, alors que 8% lisent des livres juridiques. S'agissant de la langue de prédilection des lecteurs, le sondage relève que la langue arabe arrive en tête avec 51%, suivie par la langue française à raison de 35,2% et la langue anglaise avec 14,2%. Par ailleurs, le taux d'abonnement aux magazines, périodiques et quotidiens nationaux et étrangers est «infime», note l'intervenant qui précise que le taux d'abonnés aux périodiques, par exemple, ne dépasse pas 14,2%. Concernant la continuité dans la lecture des quotidiens, le sondage relève que 45,1% des interviewés lisent des quotidiens d'expression arabe et française, alors que 9,1% d'entre eux ne les lisent point. Sur les raisons de ce constat, notamment auprès des jeunes, M. Bedaida estime qu'il résulte de facteurs historiques et socioculturels, mettant également en cause les médias et les éditeurs. De son côté, le président du Conseil supérieur de la langue arabe, Mohamed Larbi Ould Khelifa, a fait observer que la lecture en Algérie «a considérablement reculé» en raison des multimédias, tel l'Internet, qui ont concurrencé le livre, sans compter l'érosion du pouvoir d'achat du citoyen et le manque d'édition et de distribution. Evoquant les chiffres des organismes étrangers qui ont tendance à décrire une sombre réalité concernant la lecture dans le monde arabe, et selon lesquels le citoyen arabe lirait 18 pages en moyenne annuellement au moment où un Israélien parcourt 9 ouvrages et un Européen 23 par an, M. Ould Khelifa a estimé que ces chiffres, en l'absence de sondages qui prouvent le contraire, «ne reflètent guère la réalité» de la lecture dans le monde arabe. Pour sa part, l'auteur Mohamed Saïdi a appelé à la mise en place d'un «projet culturel national» pour amener le citoyen algérien à adopter consciemment un comportement civilisationnel qui l'éloigne de l'avidité pour tout ce qui est matériel, faisant observer que la société algérienne est devenue une société consommatrice plus que productrice.