A quelle aune devrions-nous mesurer nos défauts, leur nombre, leur importance et, surtout, leurs conséquences sur l'image que nous donnons de la société algérienne ? Des défauts, il y en a beaucoup. Mais aussi des qualités. J'aborde ce sujet avec un peu d'appréhension parce qu'il n'est pas toujours facile de dire la vérité à quelqu'un avec lequel on partage de nombreuses valeurs. Ce proche, c'est vous, c'est moi, c'est le voisin, le parent, l'ami, c'est l'homme ou la femme que vous croisez tous les jours dans la rue dans l'escalier ou dans l'ascenseur, c'est l'employé, le patron, le collègue de bureau, le paysan, le fellah, l'ouvrier, l'étudiant, bref c'est nous tous réunis qui formons un peuple aujourd'hui. Avons-nous des défauts ? Bien sûr, comme tous les peuples du monde. Et le premier défaut qui vient à l'esprit de quelqu'un qui ne nous connaît pas et qui nous le colle immédiatement, c'est la violence. C'est une profonde erreur de croire que l'Algérien est viscéralement violent. La violence dans les écoles n'est pas une «spécialité» algérienne. Elle existe dans tous les pays du monde. La violence dans les stades non plus. Même la violence terroriste n'est pas une «spécialité» algérienne. Elle est tout aussi immonde ailleurs. Cet écueil évité, il apparaît clairement et au grand jour que le grand défaut de notre cuirasse reste le manque et même l'absence de tout sens de l'effort. Sans aller chercher de vagues justifications dans la mentalité beylik, il faut le reconnaître, en toute humilité, le travail nous rebute. Ceci explique l'incroyable absentéisme que nous constatons tous les jours sur les lieux de travail, que ce soit une administration ou un chantier, et aussi le peu de rentabilité de nos entreprises (il y a d'autres paramètres évidemment qui entrent en ligne de compte). C'est pourquoi les pouvoirs publics font de plus en plus appel à la main-d'œuvre étrangère, chinoise en particulier. A titre d'exemple, il a fallu une décennie, peut-être plus, pour faire sortir de terre l'hôtel El-Aurassi. Les Chinois ont mis trois fois moins de temps pour le livrer presque clefs en main. Et nous ne parlons pas de l'autoroute Est-Ouest longue de 1 200 km. Imaginez que nous l'ayons confiée à nos opérateurs nationaux ? Où en serions-nous aujourd'hui et dans combien de décennies nous livrera-t-on le chantier ? Les Chinois, c'est vrai, travaillent même la nuit à la lumière des torches, ils travaillent également les vendredis. Ce qui est loin d'être notre cas. Indépendamment de ce travers que nous reconnaissons et qui ne nous fait pas honneur, nous manquons de finition dans tout ce que nous entreprenons à de rares exceptions près, bien sûr. Nos bonbons, par exemple, dégoulinent de confiture et collent au papier d'emballage, nos lampes ont une vie qui ne dépasse pas généralement les 30 jours, nos logements, du moins ceux livrés chantiers par chantiers, ont toujours quelque chose qui cloche, ou il n'y a pas de sanitaire ou il n'y a pas de robinets, ou la peinture s'écaille. Bref, nous ne sommes pas encore sortis de l'auberge.