C'est un véritable défi que s'est lancé EMS Champion Post Algeria, filiale du groupe public Algérie Poste, face à la concurrence déloyale qui sévit dans le marché de la distribution «Express» du courrier domestique. En effet selon le P-dg d'EMS, Noureddine Boufennara, repris par l'APS hier, la filiale vise à augmenter ses parts de marché en 2014 et cela malgré que l'activité soit gangrénée par l'informel. «Pour ce faire, nous comptons nous redéployer en 2014 sur le segment domestique avec une révision de nos tarifs, et nous adaptant au marché naissant du commerce électronique», a indiqué le P-dg qui précise que «pour l'exercice 2014, nous comptons nous ouvrir sur le grand public». Notons au passage que depuis sa création en mai 2011, EMS Champion Post Algeria a investi dans la distribution du courrier express institutionnel, professionnel et administratif à raison de 400 000 envois par an, assurant la distribution en 24 heures dans vingt wilayas à partir d'Alger. Mais, d'après Boufennara, «EMS n'a pas mené jusqu'à présent de campagne publicitaire pour la simple raison que nos capacités financières étaient très en deçà pour pouvoir financer une telle opération marketing». Aujourd'hui, d'après ce responsable, «au terme de l'exercice 2013, EMS qui emploie actuellement 170 personnes, a mis en place la logistique nécessaire qui lui permettra d'offrir ses services au grand public et de mettre toutes les chances de réussite de son côté en misant sur un meilleur ratio qualité/prix du marché». Toujours à propos du redéploiement de sa filiale, le P-dg a en outre expliqué que «durant le même exercice, conséquemment à son ouverture sur le grand public, EMS Champion Post Algeria compte également revoir sa grille des tarifs qui sera en équilibre entre la demande du client et la prestation fournie, sans pour autant l'aligner sur celle de la concurrence». Au registre des perspectives de la filiale, Boufennara fera savoir que «pour 2014, on prévoit un chiffre d'affaires de 214,1 millions de dinars contre 150,7 millions de DA réalisés en 2013, 141,9 millions de DA en 2012 et 92,4 millions de DA en 2011». Au sujet de la nouvelle stratégie que compte adopter EMS, le P-dg a argué qu'il est devenu nécessaire pour EMS de s'adapter au marché naissant du commerce électronique en Algérie, qui réserve une bonne part aux distributeurs de produits, notant dans la foulée qu'«en Europe, ce commerce a permis de réaliser un saut considérable des activités de tous les opérateurs du courrier express». Et d'ajouter que «cette activité ne figure pas dans mon registre de commerce. J'ai fait tout le nécessaire et j'espère qu'on va me l'attribuer. De cette manière peut-être, je vais participer au développement du e-commerce en Algérie. Le développement du e-commerce va nous permettre d'avoir des parts de marché considérables». Il a reconnu que même si le segment du commerce électronique en Algérie regorge de potentialités, son développement est tributaire de «la volonté politique» et des moyens techniques que l'on veut mettre à la disposition de ce créneau d'activité, «alors que la main-d'œuvre qualifiée est disponible et déjà à l'oeuvre, à travers les start-up qui poussent comme des champignons et qui conçoivent des sites de vente qui n'ont rien à envier à ceux des pays développés, mais rien ne bouge», a déploré Boufennara. Quand au déploiement à l'international d'EMS, son patron a annoncé que la filiale va s'ouvrir «véritablement» vers l'international et élargir son réseau domestique à travers la création de nouveaux bureaux EMS dans plusieurs wilayas. Concernant le poids de l'informel dans le marché du courrier domestique, où EMS est leader dans la distribution rapide du courrier domestique, avec plus de 80% des parts du marché, dont 60% de l'activité sont concentrés à Alger, Boufennara, qui a confirmé ces taux, dira que la filiale d'Algérie Poste fait face à un concurrent de taille : l'informel. «A notre installation en mai 2011, notre priorité était de récupérer le maximum de parts de marché du courrier domestique. Au bout de deux exercices, on est devenu leader. On avait la plus grosse part du marché domestique.» Cependant le P-dg a tenu à signaler : «Quand je dis 80% des parts de marché, c'est par rapport à la corporation officielle parce que, finalement, on s'est rendu compte d'un phénomène qui est en train de gangrener non seulement l'activité du courrier express mais toute l'économie algérienne : c'est l'informel», s'est-il indigné. Il estime par ailleurs «énorme» la part de marché occupée par les activités informelles de distribution de courrier et de colis devant qui «les opérateurs officiellement agréés ne représentent que le minimum du minimum». Il a été constaté en effet que la distribution illégale du courrier express est exercée au niveau des gares routières par les chauffeurs de taxis et de bus de transport de voyageurs sur les lignes inter-wilaya. Interrogés à ce propos, des transporteurs à la gare routière du Caroubier (Alger) estiment que l'acheminement commercial du courrier et des colis est un «service d'accompagnement» qu'ils rendent aux voyageurs en «temps réel» pour toutes les destinations sur le territoire national. Ils assurent que les gens leur confient «en toute confiance et sécurité», contre un reçu, des valises, des colis et même des sommes d'argent à remettre aux destinataires. Les tarifs de ce «service d'accompagnement» varient selon les transporteurs, précisent-ils. Ainsi, envoyer un courrier d'Alger à Biskra coûte 200 DA à verser d'avance, contre 500 DA pour Sétif alors que pour Bechar, le service pourrait être facturé jusqu'à 1 000 DA. Les tarifs des colis sont alignés en fait sur ceux des places de voyage, en taxis ou en bus, selon des témoignages recueillis à la gare routière du Caroubier, à Alger. Alertée sur ce phénomène, l'Autorité de régulation de la poste et des télécommunications (Arpt) a organisé, début novembre 2013, une réunion de concertation avec l'ensemble des intervenants (professionnels, syndicats des transporteurs, services de sécurité, le Cnrc et les ministères de la Poste et du Commerce) pour se pencher sur «la problématique du transport illégal du courrier et des colis postaux». Le P-dg de l'EMS Champion Post Algeria espère une application «stricte» de la règlementation en vigueur et suggère la présence d'une force sécuritaire de «persuasion» au niveau des gares routières. Z. A.