Amine Echikr Le monde d'aujourd'hui répond à une configuration qui n'est plus la bonne. La majorité des pays membres de l'Organisation des Nations unies n'était pas présente lors de la rédaction et de l'adoption de la Charte. Elle n'était pas présente lors du partage des sièges des membres permanents du Conseil de sécurité, et les pays ayant perdu la Seconde Guerre mondiale en ont été exclus. Ce partage du monde n'a plus lieu d'être. Des pays comme le Japon, l'Allemagne ou l'Inde doivent pouvoir dire leur mot. Des continents comme l'Afrique et l'Amérique latine en sont exclus de fait et militent pour avoir une place dans ce monde où les intérêts du Sud sont bien différents de ceux du Nord. Cette hégémonie des grandes puissances ne s'arrête pas au seuil de l'immeuble de New York. Elle a des conséquences néfastes sur des peuples pour lesquels on décrète le bonheur même contre leur gré. Il en va ainsi des Irakiens, des Libyens, des Syriens et de biens d'autres peuples. Beaucoup de décisions sont prises sans que les Etats concernés ne puissent avoir droit à la parole. Le Conseil de sécurité sème le chaos et laisse les peuples s'entredéchirer. L'Algérie, comme d'autres pays non-alignés, milite depuis des années pour que la voix de ces continents se fasse mieux entendre. Les dégâts causés par des décisions pas suffisamment réfléchies ont conduit à l'affaiblissement non seulement du pays concerné, mais également des pays voisins. Ceux qui pensent que la situation en Centrafrique et au Nigéria n'est pas une conséquence des événements de Libye, n'ont pas une bonne connaissance des ramifications des mouvements et des populations dans cette région d'Afrique. L'Asie mineure subit également les contres-coups des décisions prises pour «pacifier» un Afghanistan que l'on avait armé pour déstabiliser l'Urss. L'effet boule de neige a été les attentats du 11 septembre et son corollaire la guerre contre le terrorisme. Il en va ainsi dans ce monde où les puissants du siècle passé entendent maintenir leur hégémonie envers des populations qui ne demandent qu'à vivre. L'Algérie, les pays non-alignés et les sans voix savent que le monde à évoluer et que les choses ne peuvent rester en l'état. La Palestine ne peut rester sans retrouver ses frontières de 1967 et qui ont fait l'objet d'une résolution de l'ONU. Le Sahara occidental ne peut rester sous domination marocaine et faire tache dans les annales onusiennes comme l'un des derniers dossiers de décolonisation au 21e siècle. Le soutien direct ou indirect au terrorisme ne peut continuer sous couvert d'aide aux oppositions. Le commerce mondial et les termes de l'échange doivent être rééquilibrés en faveur de ceux qui en ont le plus besoin. La guerre des monnaies fait plus de mal aux pays qui se trouvent hors des circuits commerciaux mondiaux qu'à ceux qui subventionnent ou qui payent une misère leurs employés tout en étant considérés comme étant «l'atelier du monde». La relance du mouvement des pays non-alignés, le renforcement du rôle du G77 et des attributions nouvelles et plus efficaces pour des organisations comme l'Union africaine, sont de plus en plus nécessaires pour que les sans voix puissent être entendus. L'Algérie qui milite, depuis Belgrade en 1961, pour un ordre international plus juste et plus équilibré a eu à connaître tous les fléaux qui naissent de décisions pas suffisamment muries. La situation qui prévaut dans l'entourage immédiat de notre pays est due, pour une grosse partie, à cette nouvelle doctrine interventionniste qui se cache derrière un pseudo droit d'ingérence humanitaire. Les pays des Balkans qui ont explosé, ont été la première et amère expérience de ce nouveau droit qui continue de déstabiliser l'Europe de l'Est. L'intervention en Afghanistan a eu ses répercussions sur les anciennes Républiques soviétiques sans en faire des modèles de démocratie. Les situations en Irak et Syrie n'augurent rien de bon pour les peuples de la région sans que le multipartisme n'ait apporté plus de libertés individuelles ou collectives. La déstabilisation de la Lybie a engendré une situation d'extrême tension dans la sous-région, entraînant d'autres interventions étrangères dans divers pays africains. C'est à tout cela que les Etats soucieux de la stabilité et du progrès dans le monde, devront s'atteler avant que le chaos n'atteigne d'autres régions. Les bonnes idées, même vieilles, ne meurent jamais quand elles s'inscrivent dans le sens de l'Histoire. Elles restent d'actualité tant qu'elles n'ont pas été mises en œuvre. L'idée d'un monde meilleur, plus juste pour les humains remonte aux premières années de l'humanité. Les années où l'Homme a enfin compris que la force ne faisait pas la loi. A. E.