L'Algérie participera aujourd'hui à Paris au fameux défilé du 14-Juillet qui coïncide, cette année, avec le centenaire de la Première Guerre mondiale (1914-1918). Il s'agit d'une première qui a suscité une vive polémique de part et d'autre de la Méditerranée. La délégation algérienne à cette grandiose commémoration sera conduite par un membre du gouvernement. Elle sera composée, comme celles représentant chacune des quatre-vingts autres nations conviées, de trois officiers (un porte-drapeau et deux gardes) ainsi que deux jeunes filles et deux jeunes garçons. Cette présence algérienne aux Champs-Elysées n'a pas été du goût de certains partis politiques algériens qui n'ont pas manqué d'exprimer leur hostilité. Le Mouvement de la société pour la paix (MSP) rappelle que «les Algériens avaient pris part à la Première et à la Seconde Guerre mondiale alors que leur pays était colonisé. Ils ont été forcés à le faire». L'autre formation islamiste, le Front pour la justice et le développement (FJD) ainsi que l'Organisation nationale des moudjahidine (ONM), représentant les combattants de la Guerre de libération nationale (1954-1962), se sont aussi publiquement opposés à cette célébration. En France, les milieux proches du Front national (FN), en éternels nostalgiques de l'Algérie de papa, n'ont pas digéré non plus cette présence du drapeau algérien sous l'Arc de Triomphe. «Ceux qui avaient combattu étaient Français. Par conséquent, les soldats algériens n'ont rien à faire aux Champs-Elysées», indique Marine le Pen, la patronne du FN, adoptant curieusement la même logique que celle d'Abderrazak Mokri du MSP. À quelques jours d'intervalle et en guise de provocation ridicule, Robert Menard, le maire FN de Béziers, dépose une gerbe de fleurs à la mémoire des «martyrs de l'OAS». Une bande de tueurs, partisans de la terre brûlée, qui endeuillèrent des centaines de familles algériennes et françaises au lendemain de la proclamation de l'Indépendance de l'Algérie. Pour revenir un peu aux tranchées, selon les chiffres officiels, plus de 200 000 algériens ont été mobilisés durant la Première Guerre mondiale. 28 000 y laisseront leur vie en se distinguant au combat. Puisqu'on parle d'Algériens enrôlés pour la libération de la France, il convient de souligner aussi que plus 150 000 de nos compatriotes avaient participé à la Seconde Guerre mondiale (1939-1945). 3 000 parmi eux seront tués et 60 000 séjourneront dans l'enfer des geôles nazies. Leur sacrifice, de l'avis de plusieurs historiens, était décisif dans la libération de Paris et la victoire des alliés en mai 1945. Ne convient-il, donc, pas de saluer, deux fois plutôt qu'une, la mémoire de tous ces hommes qui se sont sacrifiés, certes contraints, pour la liberté et la justice ? Après tout, quand il s'agit de guerre et de mort, personne ne se lance de gaieté de cœur ! Nul n'a vraiment le choix, on est tous forcés de dégainer pour se défendre et refouler l'envahisseur. «Le peuple algérien assume toute son histoire et honore ses propres contributions à la liberté à travers le monde», justifie le chef de la diplomatie algérienne, Ramtane Lamamra. «Ce n'était pas un honneur qui vous est fait, c'était une reconnaissance que la France voulait porter à toutes les nations qui s'étaient engagées dans cette terrible guerre, il y a 100 ans [...]», disait François Hollande à l'endroit de ses hôtes. Voilà qui est bien dit. Il s'agit d'un vibrant hommage à des héros, presque anonymes car méconnus, qui se sont sacrifiés sur l'autel de la liberté. Toute autre interprétation n'est que mesquinerie politicienne qui ne convainc plus personne. Ni ici même ni ailleurs. K. A.