Le Pakistan renforçait, hier, la sécurité dans les grandes villes au lendemain d'un attentat suicide qui a fait une cinquantaine de morts à sa frontière avec l'Inde, à l'occasion de processions de la minorité chiite, dans le collimateur des extrémistes. Au moins 55 personnes ont été tuées dans cet attentat, le plus meurtrier cette année, perpétré dimanche soir dernier, alors qu'une foule nombreuse quittait le poste frontière de Wagah, théâtre au quotidien de célébrations nationalistes et mini-parades militaires de soldats indiens et pakistanais. Différentes factions des talibans pakistanais ont revendiqué cette rare attaque à la frontière entre deux puissances nucléaires rivales, menée, selon elles, en représailles à l'opération de l'armée, lancée à la mi-juin, dans des fiefs des insurgés, près de la frontière afghane. L'attentat a peut-être ciblé Wagah en raison «d'un soutien perçu aux forces armées» de la part de la population civile assistant à la cérémonie, s'interrogeait d'ailleurs, hier, le quotidien Dawn dans un éditorial. Les autorités pakistanaises ont annoncé que Wagah, principal poste frontière entre l'Inde et le Pakistan traversé chaque jour par des convoyeurs et des voyageurs, allait demeurer ouvert hier, mais que la cérémonie nationaliste quotidienne allait être interrompue pendant au moins trois jours. À travers le pays, la police était, hier, en «Etat d'alerte» et avait renforcé ses effectifs afin de protéger les processions de l'Achoura, l'un des événements les plus importants du calendrier de la minorité musulmane chiite. Au cours des dernières années, des groupes islamistes sunnites armés ont en effet ciblé les processions des chiites qui forment environ 20% de la population du Pakistan, géant musulman de plus de 180 millions d'habitants. À Islamabad, la capitale, et dans la ville voisine de Rawalpindi, théâtre de nombreux attentats antichiites, 10 000 policiers, militaires et paramilitaires avaient ainsi été déployés pour protéger les processions prévues lundi et mardi. Avec le renforcement annuel des mesures de sécurité pour l'Achoura, les insurgés ont peut-être décidé cette année de changer de cible afin de frapper là où ils n'étaient pas attendus, au poste frontière de Wagah, a suggéré l'analyste politique et sécuritaire Hasan Askari. «Et puis cela leur permettait de blâmer l'Inde pour l'attentat, même si l'on sait bien que ceux qui ont mené l'attaque viennent d'ici», a-t-il ajouté. Le Premier ministre indien, Narendra Modi, dont les relations sont plutôt rocailleuses avec le Pakistan, les deux pays ayant multiplié ces dernières semaines les bombardements meurtriers dans la région disputée du Cachemire, a «vivement condamné» l'attentat de Wagah et «présenté ses condoléances» aux victimes pakistanaises.