Le relogement des familles occupant des habitations précaires au Val d'Hydra, sur les hauteurs d'Alger, se poursuivait hier au milieu d'un important cordon de sécurité, alors que les premières opérations de démolition ont commencé, a constaté un journaliste de l'APS, tandis qu'à Chemini, la RN 26, reliant Béjaïa à Bouira, a été de nouveau fermée par les habitants des agglomérations de Chemini, Tifra, Souk-oufella et Akfadou, situées à 60 km à l'ouest de Béjaïa, réclamant leur «raccordement immédiat» au réseau de distribution de gaz naturel. Au Val d'Hydra, la colère se lisait amplement sur les visages des propriétaires de maisons et de commerces, construits le long de la route et appelés à être rasés pour les besoins du projet de dédoublement de voie, déclaré d'utilité publique. Pour exprimer leur colère et leur opposition à l'opération de relogement initiée lundi soir par la wilaya, ils ont accroché plusieurs banderoles sur les façades de leurs maisons où on pouvait lire : «Non au relogement abusif». «Il y a des citoyens qui ont consacré toute leur vie à construire des habitations et des commerces à coup de milliards. Du jour au lendemain, on nous demande de quitter les lieux. C'est abusif. Même si le terrain est un bien waqf, pourquoi attendre quarante ans pour se le rappeler ?», s'insurgeait un jeune du quartier. «Nous ne partirons pas de là sans un engagement écrit de la wilaya sur les indemnisations et l'affectation des futurs locaux», lance un autre jeune. D'autres habitants disent refuser carrément de quitter les lieux, tout en soupçonnant une volonté d'accaparer les terrains à leur détriment. Dès l'annonce dimanche du recasement de 300 familles du Val d'Hydra, dans le cadre de la 14e opération de relogement des familles issues des sites précaires, le wali Abdelkader Zoukh a parlé d'indemnisation des propriétaires. «Les constructions et les commerces du Val d'Hydra sont illicites. Nous avons procédé à l'expropriation parce que le projet relève de l'utilité publique et les commerçants seront prioritaires dans l'affectation de locaux dans les nouvelles cités», a dit M. Zoukh. «Les propriétaires seront indemnisés en fonction de la loi en vigueur», a-t-il assuré mardi lors d'une visite d'inspection au projet du barrage de Douéra. «Nous voulons d'abord connaître les détails des indemnisations et des procédures de réalisation et d'affectation des futurs locaux. Si ces locaux sont réalisés et cédés au plus offrant, à coup de milliards, cela ne nous arrange pas», précisent les propriétaires. Ces derniers se sont entendus «pour refuser unanimement le recasement jusqu'à la satisfaction de nos revendications». À Béjaïa, les protestataires, à l'origine d'un mouvement qui dure depuis plusieurs jours, marqué, entre autres, par des obstructions de routes, une grève générale dans chacune des localités concernées, et un rassemblement devant la wilaya, ont recouru, une fois de plus, au gel du trafic routier en jonchant d'obstacles la chaussée, à différents niveaux, notamment à l'entrée de la ville de Takerietz et à Boutaghout, bloquant de fait des milliers d'automobilistes se dirigeant vers Béjaïa, Jijel ou Sétif, vers l'est, ou, inversement, les usagers devant rallier la partie ouest de la vallée de la Soummam, ou Bouira, voire Alger. Le tronçon est éminemment stratégique, accueillant jusqu'à 40 000 véhicules/jours, selon la direction des travaux publics. Sa fermeture a généré des conséquences sociales et économiques «insoupçonnées». Le port de Béjaïa accuse 2 millions de dinars de manque à gagner par heure de fermeture et d'autres entreprises, qui ne sont pas des moindres, notamment Naftal pour la distribution de gaz en bouteille, ou l'Office Algérien interprofessionnel des xéréales, qui alimente à partir du port de Béjaïa huit wilayas du Centre, en souffrent terriblement selon leurs responsables respectifs. Les contestataires ont radicalisé leur position pour maintenir la pression sur les autorités locales afin de les raccorder dans un court délai au réseau de gaz naturel. Bien que le projet soit inscrit, selon la wilaya, au titre de la 3e tranche du plan quinquennal 2010-2014, dont la mise en œuvre a débuté en juillet dernier avec du retard, ceux-ci affirment ne plus pouvoir patienter. «On nous a fait des promesses en 2011, et depuis on ne fait que patienter. Mais visiblement, on n'a pas pris la mesure de nos limites. On est vraiment à bout, d'autant que certaines localités du voisinage ont rapidement été raccordées», se plaint-on au comité de coordination des quatre localités. R. I.