La culture et les arts, dans la société de consommation d'aujourd'hui, ne peuvent s'affranchir de la dimension marketing. Toutefois, critiques, artistes et journalistes divergent sur cette notion de marketing culturel. En effet, on ne «vend» pas un spectacle, une toile ou un film comme on vend un pot de sauce tomate. Concernant les produits de consommation et les services, le marketing consiste à élaborer des produits qui répondent exactement aux souhaits et aux désirs du client. Des enquêtes poussées et des études fouillées sont menées pour déceler les goûts et les tendances nouvelles des consommateurs. Dans ce registre, on dit que le client est roi et les concepteurs de nouveaux produits lui sont totalement soumis. Mais, un artiste ne peut pas s'effacer ainsi devant son public pour suspendre la démarche d'élaboration de l'œuvre aux seules envies de ses fans. C'est sa liberté d'expression et son âme de créateur qui sont mises en jeu. Même si l'avis du public compte beaucoup, celui-ci ne doit pas être prépondérant dans la dimension créative et artistique. À ce niveau, le marketing consiste généralement à «trouver» le public en fonction de l'œuvre, et non à élaborer l'œuvre en fonction du public. Exemple : une pièce de théâtre pour enfants cible une tranche d'âge bien précise. En plus des institutions et des établissements culturels, elle doit être promue prioritairement dans les écoles, les crèches et les espaces de proximité, dans les cités résidentielles. On ne va pas proposer cela dans une université ou une maison de retraite ! À la lumière de ce bref éclairage, on réalise que le marketing culturel est très utile, voire indispensable, dans la promotion et le succès des produits culturels. Avant même de pouvoir vendre le produit au public, il faut convaincre les institutions publiques et privées d'investir dans le projet. Arrive ensuite l'étape où il faut convaincre le public de venir. Un festival a besoin de mécènes et sponsors pour pouvoir être produit, et le public doit être préalablement «alléché» afin d'avoir envie de voir le spectacle et consentir à la dépense en achetant les billets ou le produit. En gros, le marketing culturel conjugue conception artistique, financement de la production et promotion de l'œuvre ou du produit auprès de sa cible. Avec l'avènement d'Internet, le marketing culturel s'est offert de nouveaux supports pour atteindre avec plus de précision toutes ses cibles. Malgré les nombreux avantages énumérés précédemment, cette notion du marketing culturel reste si peu utilisée en Algérie. La faible dimension des entreprises et des promoteurs culturels pour pouvoir se permettre des équipes spécialisées dans ce domaine ne justifie pas tout. À leur «petit» niveau, producteurs et artistes peuvent faire des choses dans ce sens. Il s'agit de revoir sa démarche dès le départ. Chez nous, l'écrivain, le dramaturge, le scénariste ou le musicien n'exposent pas leur idée initiale aux parties censées lui garantir le succès après sa concrétisation effective. De crainte de se faire «voler» le projet, ils le développent en catimini et le propose déjà «emballé» aux institutions et aux mécènes. Ces derniers, non avertis à l'avance, trouvent généralement à redire pour refuser d'y souscrire au final. Disons que le créateur n'est pas suffisamment protégé et l'éthique fait défaut dans les cercles de la production artistique. Mais il va falloir trouver des réponses à tous ces soucis, car la culture algérienne ne peut éternellement se passer d'un instrument de promotion aussi efficace, à l'intérieur comme à l'extérieur du pays. Les artistes autonomes, les petites sociétés de production audiovisuelle, les coopératives théâtrales et les maisons d'édition ont intérêt à révolutionner progressivement leurs démarches et à assouplir leurs modes opératoires pour mieux soutenir leurs projets et mettre toutes les chances de réussite de leur côté. La marche d'un mile commence toujours par un pas. K. A.