Au lendemain de la mise à la retraite du général de corps d'armée Mohamed Lamine Médiene, la Tribune soulignait alors que son départ marquait la fin d'une époque. Et que son retrait de la scène sécuritaire était le prélude à la disparition du Département du renseignement et de la sécurité (DRS) sous sa forme d'hyperstructure cumulant l'espionnage, le contre-espionnage, l'antiterrorisme, la sécurité militaire et la fonction de police politique atrophiée. Une redistribution préalable des missions, avec notamment la reconfiguration de la Sécurité de l'armée, élevée au rang de corps d'armée à part entière, avait été opérée. Le président de la République, en sa double qualité de chef suprême des forces armées et de ministre de la Défense en titre, avait également ôté au DRS la fonction de contrôle des médias qui était la partie la plus visible de la police politique. A cette même date, la Tribune avait souligné que ce reformatage du système sécuritaire sous tutelle de l'ANP, procédait d'une évolution doctrinale de la notion de sécurité et de l'activité de renseignement. Et que l'idée centrale de cette réforme était de recentrer nos services sur le cœur même de leur métier : le renseignement. Chose désormais faite avec le nouveau décret présidentiel non publiable, signé le 20 janvier. Ce texte transforme l'ex-DRS en Direction des affaires sécuritaires, placée sous l'autorité suprême du chef de l'Etat, avec à sa tête un coordinateur en la personne du général-major à la retraite Bachir Tartag, précédemment patron temporaire du DRS. Et c'est en sa qualité de civil que l'ancien proche collaborateur de M. Mediene a été nommé à ce nouveau poste, avec le grade civil et la fonction politique de ministre-conseiller. C'est donc la première fois depuis 1962 qu'un civil est nommé premier responsable exécutif des services de sécurité et de renseignement. Et c'est la première fois également que l'armée ne les chapeaute plus, exception faite du renseignement et de la sécurité militaire. Donc, la sécurité de l'armée reste une affaire exclusive de l'ANP et l'espionnage, le contre-espionnage, le renseignement relatif au terrorisme et le renseignement à base technologique (Sigint) seront désormais une affaire d'experts militaires et civils travaillant sous le contrôle direct de la présidence de la République. C'est un vrai changement, une évolution qui n'est pas seulement d'ordre technique et structurelle. Le décret présidentiel non publiable au JO insiste sur le souci d'une meilleure coordination entre les services et une définition plus précise des prérogatives. En clair, mieux cerner qui fait quoi et comment, et qui dépend de qui, sans les chevauchements et autres confusions de rôles comme ce fut parfois le cas par le passé. Cette nouvelle organisation rappelle un peu le schéma sécuritaire français. Avec, d'une part, la DRM, la Direction de renseignement militaire qui dépend du ministère de la Défense, ainsi que la Dgse, la structure de sécurité extérieure sous tutelle administrative de l'armée, mais dirigée le plus souvent par un civil et placée sous l'autorité de l'Exécutif. Et, d'autre part, la Dgsi, la Direction générale de la sécurité intérieure, issue de la fusion de l'ancienne DST et des RG et intégrant L'Unité de coordination de la lutte antiterroriste (Uclat), structure assurant la coordination de l'ensemble des services chargés de la lutte contre le terrorisme. Organisme regroupant des représentants de toutes les directions actives de la police et la gendarmerie et travaillant étroitement avec la direction de la protection et de la sécurité de la défense (Dpsd), la Dgsi, la Dgse, le Bureau de la lutte anti-terroriste (Blat) et la direction générale des Douanes. Une organisation et une vision du renseignement qui expriment le souci de mutualiser les intelligences, les énergies et les moyens. N. K.