Dix personnes ont été tuées et quatre blessées hier dans un attentat-suicide visant un minibus transportant des employés d'un tribunal dans la banlieue ouest de Kaboul. «Le kamikaze était à pied, il s'est fait exploser en se précipitant contre le véhicule», ont indiqué les autorités afghanes. L'attentat n'a pas été revendiqué. Il est intervenu au moment de la confirmation par les taliban de la mort dans une frappe de drone américain de leur chef, le mollah Akhtar Mansour, et de son remplacement par son adjoint, Haibatullah Akhunzada. Au bout de trois jours de délibérations, leur choix s'est porté sur Akhundzada, un dignitaire religieux peu connu et ancien bras droit de Mansour. Il aura la lourde tâche d'unifier un mouvement fragmenté et profondément divisé sur la question de la reprise ou non des pourparlers de paix avec le gouvernement afghan. Sa désignation a été «unanime et tous les membres lui ont fait allégeance», ont assuré les talibans dans un communiqué. Ce choix est relativement inattendu, car le mollah Haibatullah n'était pas considéré comme l'un des favoris. Nombre de spécialistes penchaient davantage en direction de deux autres figures de l'insurrection : le mollah Yacoub, fils du mollah Omar, fondateur du mouvement, et Sirajuddin Haqqani, chef du réseau du même nom et proche allié des talibans. Le mollah Haibatullah est âgé d'environ 50 ans et était lui-même adjoint du mollah Akhtar Mansour. Le mollah Haibatullah va devoir trancher l'épineuse question de l'opportunité de renouer le dialogue avec le gouvernement afghan pour tenter de mettre fin à l'insurrection, qui dure depuis près de 15 ans. Sous son prédécesseur, les timides négociations de paix avaient été suspendues sine die l'été dernier et les efforts de Kaboul pour faire revenir les talibans à la table des négociations ont tous échoué. Et les observateurs sont très sceptiques quant à la volonté du nouveau chef de relancer le dialogue. «Il ne va pas négocier» avec le gouvernement afghan, assure Yousafzaï. «Il est considéré comme partisan de négociations de paix (...) mais il ne peut rien faire sans le consensus de la choura», l'organe de direction des talibans, dont nombre de membres ne veulent pas entendre parler d'un quelconque dialogue, juge de son côté l'analyste pakistanais Amir Rana. C'est semble-t-il la posture belliqueuse du mollah Mansour qui a poussé Washington à l'éliminer. En annonçant son décès, le président Barack Obama a évoqué «un jalon dans notre effort au long cours pour ramener paix et prospérité en Afghanistan». Car la courte ère Mansour (à peine dix mois) a été marquée par une accentuation des offensives militaires et la multiplication des attentats, notamment à Kaboul. Jusqu'ici muets sur le sort de leur chef, les talibans ont profité de l'annonce de la désignation du mollah Haibatullah pour confirmer sa mort «en martyr» dans une zone reculée du Pakistan.