Un appel est lancé pour aller vers un cinéma de réflexion et la construction de personnages cinématographiques avec leur dimension humaine, et de dialogue intracommunautaire En marge de la 9e édition du Festival internationale d'Oran du film arabe (Fiofa-2016), un colloque de deux jours a été animé, dimanche et lundi derniers, au théâtre régional Abdelkader-Alloula autour de la thématique «l'Autre, dans le cinéma arabe». Différents intervenants venus d'Algérie, d'Egypte et du Maroc ont présenté leurs conférences autour de la problématique central qui est «l'Ego et l'autre, une dualité consacrée par la pensée européenne et importée par la pensée arabe sans conscience de ce qu'elle aura comme impact sur la relation de l'homme Arabe avec l'autre». Le critique et spécialiste du cinéma Ahmed Megdi Hamam d'Egypte a présenté dans ce contexte «l'image de l'Autre dans le cinéma arabe, le cas du film palestinien Omar». Il explique le choix du film Omar réalisé par le Palestinien Hani Abousaad en expliquant que «personnellement, j'ai trouvé des difficultés à définir le concept de l'autre. Je considère que l'autre n'est pas juste une question d'origines ethniques ou religieuse. Pour moi, l'autre c'est celui qui n'appartient pas à cette terre arabe. De ce fait l'Israélien est un autre car c'est un colonisateur». Il souligne que «la perception idéologique et politique dans une œuvre artistique c'est comme des imperfections dans l'or. Le réalisateur palestinien n'a pas idéalisé le personnage israélien dans une image positive, il a juste construit un personnage proche de la réalité qui hélas existe. Mais au-delà de ça, le film se clôture sur la nécessité d'interagir avec l'autre, en l'occurrence, ici, le personnage incarnant la colonisation israélienne qui use de violence par le langage et l'acte. Cela démontre que le film porte en lui le patriotisme palestinien». Pour sa part, à travers son intervention intitulée «La reproduction de la voix de l'Autre dans le cinéma marocain», le critique marocain c'est attelé à démontrer que tout dépend de la formation politique, philosophique et esthétique du réalisateur. Il souligne à ce propos «qu'il est important de percevoir l'autre en tant qu'humain et de là d'un point de vue humaniste et philosophique sortir des clichées et des carcans. Il s'agit dans le cinéma arabe de percevoir l'autre avec le droit à la différence, s'ouvrir à l'autre, poser des interrogations afin de comprendre l'autre et ainsi interagir avec lui. Personnellement, j'ai foi dans le dialogue avec l'autre et il serait intéressant de capitaliser cette différence comme un enrichissement et non pas comme une source de conflits. C'est ce défi que doit relever le cinéma arabe». La deuxième journée du colloque a été animée par les Egyptiens Mohamed Abderahmane, directeur du site électronique elilam.org, Mouna Chadid, critique cinéma et journaliste au journal Massaiyat Al Ahram, et le critique et spécialiste du cinéma l'algérien Nabil Hadji. Mouna Chadid a pris le cas d'école du réalisateur Youcef Chahine afin de présenter la vision de l'autre et son évolution à travers trois de ses œuvres Djamila l'algérienne, Alexandrie-New York et le court métrage de Youcef aux côtés de ceux de dix autres réalisateurs réunis autour de thème central du 11 septembre 2001. En analysant ces trois œuvres, elle souligne que Youcef Chahine a perception équilibrée de l'autre dans ses œuvres en sortant du manichéisme. L'autre est représenté en tant que colonisateur sans aucune pitié mais cet autre peut être l'avocat humaniste ou cette danseuse qui défend des justes causes. La vision du cinéaste à évoluer après les attentas du 11 septembre mais au final il œuvre toujours montre des personnages qui pose des questionnements afin de comprendre les motivations de l'autre. Pour sa part, Nabil Hadji a abordé la problématique de l'image de l'autre dans le cinéma algérien en développant plusieurs illustrées d'exemples d'ouvres algériennes. Le premier point qu'il a abordé est celui même de la définition de l'autre et selon quel regard ? Il a aussi abordé la problématique de l'identité, la présence de l'autre dans le cinéma algérien surtout à travers le personnage du colonisateur, celle du militaire français violent, il y a aussi la question de l'autre qui en soi à travers le personnage du terroriste de plus en plus présent dans les œuvres algérienne. Nabil Hadji soulèvera aussi la question du cinéma coloniale dans l'imaginaire collectif autant chez les cinéastes que chez les spectateurs. Ainsi que la problématique de la coproduction où il y a intervention financière et intervention technique. Le conférencier souligne ce point qu'il considère que c'est un autre dans notre cinéma. Le technicien vient avec son propre regard dans un film sensé avoir une vision algérienne. De même un producteur ne peut investir son argent s'il na pas des intérêts soit économiques et commerciaux, soit des intérêts idéologiques et politiques. De son côté, Mohamed Abderahmane, souligne dans le cinéma égyptien en particulier et dans le cinéma arabe en général, quand le concept basé sur une vision manichéenne ou l'autre est perçu ou comme un ennemi ou comme un personnage attachant mais toujours avec une approche caricaturale. Une approche superficielle souvent motivée pour des intérêts mercantiliste. Mohamed Abderahmane estime qu'aujourd'hui le cinéma doit revoir sa perception de l'autre également au sein de la perception caricaturale de l'autre arabe. Il lance un appel pour aller vers un cinéma de réflexion et de construire des personnages cinématographiques avec leur dimension humaine et de dialogue intracommunautaire. S. B.