Au moins 141 personnes, dont la plupart des soldats loyaux au maréchal Khalifa Haftar, ont été tuées dans une attaque menée par des groupes rivaux contre une base militaire dans le sud libyen. La 3e Force, un groupe armé de la ville de Misrata, officieusement loyal au gouvernement d'union nationale (GNA), a mené cette attaque contre la base aérienne de Brak Al-Shati, contrôlée par l'Armée nationale libyenne (ANL) autoproclamée par le maréchal Haftar. Parmi les victimes figurent aussi des civils qui travaillaient sur la base ou qui se trouvaient aux alentours. Selon l'ANL, «les soldats tués revenaient d'un défilé militaire dans l'est de la Libye. La plupart d'entre eux n'étaient pas armés. Ils ont été exécutés». L'ONU avait évoqué, plus tôt, un nombre important de morts et «des informations sur des exécutions». «Je suis indigné par des informations sur un nombre important de morts, y compris des civils, et des rapports selon lesquels des exécutions sommaires auraient pu avoir lieu», a réagi l'émissaire de l'ONU en Libye, Martin Kobler. Le GNA a mis en place une commission d'enquête et décidé de «suspendre le ministre de la Défense, Al-Mahdi Al-Barghathi, et le commandant de la 3e Force jusqu'à ce que soient identifiés les responsables» de l'attaque. Le GNA et le ministère de la Défense avaient tous deux condamné l'attaque affirmant ne pas avoir donné d'ordre en ce sens. La base de Brak Al-Shati est située à 650 km au sud de Tripoli, dans une région désertique où l'Etat est quasiment absent depuis que la Libye est plongée dans le chaos à la suite de l'intervention de l'Otan et la destruction du régime Kadhafi en 2011. Des affrontements réguliers y opposent des milices et des tribus pour le contrôle du trafic avec le Tchad, le Niger et le Soudan voisins. Contrôlant une grande partie de l'est et du sud libyens, le maréchal Haftar est appuyé par le Parlement élu basé à Tobrouk, hostile comme lui au GNA qui est issu d'un accord inter-libyen signé fin 2015 sous l'égide de l'ONU. Une rencontre début mai à Abou Dhabi entre le chef du GNA, Fayez Al-Sarraj, et le maréchal Haftar, a pourtant permis un timide rapprochement entre les deux hommes qui avaient convenu d'arrêter l'escalade militaire dans le sud. Depuis le début du mois d'avril, les forces loyales à Haftar avaient en effet mené plusieurs attaques contre la base aérienne de Tamenhant contrôlée par la 3e Force, et distante d'une cinquantaine de km de celle de Brak Al-Shati. La base de Tamenhant, située près de la ville de Sebha, à plus de 600 km au sud de Tripoli, est convoitée pour sa position stratégique. Après sa rencontre avec Sarraj, Haftar avait effectivement suspendu son offensive dans le sud. Aguila Saleh, le président du Parlement élu, a condamné l'attaque et a indiqué avoir donné des directives aux forces armées «afin qu'elles prennent les mesures nécessaires pour riposter à cette offensive, défendre le Sud et le nettoyer de toutes les milices hors-la-loi». Le GNA a appelé de son côté à un cessez-le-feu «immédiat» dans le sud. R. I.