Séoul et Washington ont répliqué, hier, au lancement du missile intercontinental nord-coréen par plusieurs tirs de missiles simulant une attaque contre Pyongyang La Corée du Nord a procédé, mardi dernier, avec succès, à un tir de missile balistique intercontinental (Icbm) pouvant transporter une charge nucléaire lourde et se dit désormais en mesure de frapper n'importe quel point de la planète. Ce missile, de type Hwasong-14, a atteint une altitude de 2 802 km et volé pendant 39 minutes avant de frapper avec précision son objectif, a rapporté la télévision officielle nord-coréenne. L'engin a décollé près d'un aérodrome à Panghyon, à une centaine de kilomètres au nord-ouest de la capitale, Pyongyang, ont déclaré la Corée du Nord, le Japon et les Etats-Unis. Le tir, ordonné et supervisé par le numéro un nord-coréen, Kim Jong-Un, a parcouru 933 km avant, selon Séoul, de s'abîmer en mer dans la Zone économique exclusive (ZEE) du Japon. Selon des experts, les paramètres de l'essai suggèrent une portée de plus de 8 000 km, une distance qui placerait donc des parties du territoire américain à portée de tir, en premier lieu l'Alaska. «Le tir expérimental a été réalisé avec l'angle le plus aigu possible et n'a pas eu d'effet néfaste sur les pays voisins», ont déclaré les médias nord-coréens. Des questions demeurent sur les caractéristiques de ce projectile, sur la capacité de Pyongyang à miniaturiser une tête nucléaire pour la monter sur un missile et sur sa maîtrise de la technologie de rentrée dans l'atmosphère. L'agence Kcna a assuré que le lancement avait répondu à «tous les critères technologiques, y compris la résistance à la chaleur et la stabilité structurelle de l'ogive» nécessaire pour qu'elle rentre sans dommages dans l'atmosphère. L'ogive était en fibre de carbone, selon Kcna. «Dans des conditions difficiles, impliquant une chaleur de milliers de degrés, de la pression et des secousses, la température à l'intérieur de l'ogive était stable, entre 25 et 45 degrés Celsius», a précisé l'agence. L'engin a eu une trajectoire «parfaite» et «a atteint sa cible avec précision». Le missile n'a parcouru qu'une distance inférieure à 1 000 km. Mais l'altitude atteinte prouve qu'il peut voyager bien plus loin. Le ministre sud-coréen de la Défense Han Min-koo a avancé une portée potentielle de 7 000 à 8 000 km, ce qui lui permettrait largement d'atteindre le commandement américain du Pacifique installé à Hawaï. Kim Jong-Un a annoncé que cet essai de missile marquait l'achèvement des capacités stratégiques du pays, notamment en matière de bombe nucléaire, de bombe à hydrogène et de missiles balistiques intercontinentaux. Pyongyang ne négociera pas avec les Etats-Unis une remise de ces armes, à moins que Washington n'abandonne sa politique hostile, a-t-il dit, selon Kcna. «Avec un grand sourire, il a dit aux responsables, aux scientifiques et aux techniciens que les Etats-Unis seraient peinés [...], car un ‘‘paquet de cadeaux'' leur a été offert le ‘‘Jour de l'Indépendance''», ajoute Kcna, en référence à la fête nationale américaine, qui avait lieu mardi. Selon l'agence, l'essai a permis de vérifier la bonne marche des différentes phases du missile de longue portée, notamment le retour dans l'atmosphère de la tête du missile. Les Etats-Unis, le Japon et la Corée du Sud ont tout de suite réagit à ce tir et ont demandé, mardi soir, la tenue d'une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies, à huis clos, qui devait se réunir hier. Le secrétaire d'Etat américain, Rex Tillerson, a confirmé que c'était «un missile balistique intercontinental», qu'il représentait une aggravation de la menace nucléaire de Pyongyang et méritait à ce titre une réponse globale. «Tous les pays devraient démontrer publiquement à la Corée du Nord qu'il y a des conséquences à rechercher à se doter d'armes nucléaires», a-t-il ajouté. Tout pays accueillant des travailleurs nord-coréens, fournissant une aide économique ou militaire à Pyongyang, ou ne mettant pas en œuvre les sanctions des Nations unies «apporte son concours ou son assistance à un régime dangereux». Les Etats-Unis «n'accepteront jamais une Corée du Nord disposant de l'arme nucléaire», a-t-il ajouté. Le gouvernement de Pyongyang est «un régime dangereux» et les Etats-Unis demanderont des «mesures plus fermes» lors de la réunion d'urgence du Conseil de sécurité. Toutefois, Moscou, où le président chinois Xi Jinping se trouve pour rencontrer Vladimir Poutine, a affirmé que le missile testé était un engin balistique de portée intermédiaire, contrairement à ce que les autorités nord-coréennes ont avancé. La Russie et la Chine ont appelé à un double «moratoire» : Pyongyang arrêterait ses tests nucléaires et balistiques et Washington renoncerait à organiser des manœuvres militaires à grande échelle aux côtés de son allié sud-coréen. Moscou et Pékin se sont mis d'accord sur la nécessité de geler le programme nucléaire nord-coréen et ont appelé les Etats-Unis à cesser le déploiement du système antimissile Thaad en Corée du Sud où le président, Moon Jae-in, a convoqué une réunion du conseil de sécurité nationale. Le Premier ministre japonais, Shinzo Abe, a déclaré qu'il prévoyait de demander à la Russie et à la Chine de jouer un rôle plus constructif face à la Corée du Nord, à l'occasion du sommet du G20, qui aura lieu demain et samedi à Hambourg et en marge duquel le président américain, Donald Trump, aura son premier tête-à-tête avec son homologue russe, Vladimir Poutine. Trump, qui s'entretiendra aussi avec le président chinois, a aussi réagi vivement demandant à Pékin, principal soutien international de Pyongyang, de «mettre fin à cette absurdité une bonne fois pour toutes». Il a estimé sur Twitter qu'il était «difficile de croire que la Corée du Sud et le Japon allaient tolérer ça encore longtemps». «Peut-être la Chine va-t-elle imposer un geste lourd à la Corée du Nord et mettre fin à ce non-sens une bonne fois pour toutes», a-t-il ajouté. La possession d'un missile balistique intercontinental représente un tournant pour le régime communiste et pourrait altérer les plans des Etats qui veulent contrecarrer les objectifs militaires de la Corée du Nord. Le président américain Donald Trump avait assuré en janvier, concernant la perspective d'un missile nucléaire intercontinental nord-coréen, que «cela n'arrivera pas». R. C./Agences