Selon un descendant de Raïs Hamidou, il est nécessaire d'approfondir les recherches historiques afin de rectifier certaines généralités qui passent aujourd'hui pour des vérités historiques Le Centre des arts et de la culture, le Palais des raïs (Bastion 23) a accueilli, dans la soirée de jeudi dernier, la projection-débat du documentaire Le Raïs Hamidou, héros du peuple d'Alger réalisé par Mohammed Yahiaoui. D'une durée de quinze minutes, le documentaire retrace le parcours de ce personnage historique à travers des documents de l'époque, les interventions de deux historiens, Abderahmane Khlifa et Amine Mahrez, des peintures et des extraits de films relatant les grandes batailles navales. Il y a également d'autres images d'aujourd'hui, à l'instar de la statue de Raïs Hamidou et des images de la marine algérienne moderne dont des promotions et des navires sont baptisés du nom du chef corsaire. A travers le personnage de Raïs Hamidou, c'est en fait un condensé de l'histoire de la marine algérienne lorsqu'elle régnait sur la mer Méditerranée durant plusieurs siècles qui est relaté dans ce documentaire. La projection a été suivie d'un long débat, en présence du réalisateur Mohammed Yahiaoui et de l'historien Amine Mahrez, qui répondaient aux questions des présents. Le débat a connu un rebondissement lors de l'intervention d'un des descendants de la sœur de Raïs Hamidou, en l'occurrence Hamza Zekkar, qui a présenté un bref aperçu de l'arbre généalogique de son aïeul, et a insisté sur la nécessité aujourd'hui d'approfondir les recherches historiques afin de rectifier certaines généralités qui malheureusement font aujourd'hui office de vérités historiques. Hamza Zekkar confie en marge du débat qu'il soutient tout ce qui se fait concernant l'écriture de l'histoire, «mais il serait plus judicieux que les historiens et tous ceux qui s'intéressent à la transcription de la mémoire communiquent entre eux, car personne ne détient la vérité absolue». «J'œuvre à travers mon propre travail de recherche à rétablir certaines vérités, notamment grâce à des documents et des archives auxquels j'ai réussi à avoir accès et qui remettent en question certaines certitudes historiques. Aujourd'hui, il est important que tous ceux qui travaillent sur Raïs Hamidou puissent recouper leurs informations et travailler ensemble afin de transmettre la véritable histoire de ce personnage emblématique», ajoutera-t-il. Après le débat, Mohammed Yahiaoui explique que ses films «sont toujours un lieu de rencontres. J'aime que mes films suscitent des questionnements et de la curiosité. Certes, j'ai un message à transmettre, mais quand il y a des contradictions historiques il faut les montrer aussi. Je me rappelle que la question s'était posée avec l'équipe technique qui me disait qu'un historien dit une chose et un autre son contraire et qu'il faillait trancher. J'avais répondu qu'au contraire c'est ce qui était intéressant. C'est exactement l'occasion pour moi d'exprimer des antagonismes directs dans mon film. Ainsi, on va permettre aux spectateurs de se poser des questionnements et donner de nouvelles pistes de réflexion et de recherches». Le réalisateur ajoutera que «le but à travers cela est de montrer que l'on n'a pas une version unanime de l'histoire. Plus il y a des contradictions plus on se rapproche de la réalité. Plus cela amène des interrogations et mieux on approfondit les questionnements. On avance dans cette quête de vérité, cela permet au moins d'avoir un esprit critique, d'en parler et de confronter les idées». Concernant l'intérêt qu'il porte au personnage de Raïs Hamidou, le cinéaste explique que cela avait commencé dans les années quatre-vingt, il était correspondant auprès du Centre nationale des études historiques. Féru d'histoire d'Algérie, il découvre le livre sur Raïs Hamidou d'Albert Devloux, conservateur des archives algériennes à l'époque coloniale. Impressionné par ce héros respecté par ses ennemis, un des plus grands amiraux de la flotte algérienne. Il s'est alors attelé à faire des recherches sur lui et écrit de nombreux articles sur ce sujet. C'est seulement trente ans plus tard que l'occasion s'est présentée de faire ce court documentaire avec la télévision algérienne. Mohammed Yahiaoui confie que c'était pour lui son devoir «de montrer les qualités héroïques de ce vaillant corsaire pétris de bravoure et de courage». «J'œuvre à donner une sorte de couleur et de vivacité à ce personnage historique. Il est important aujourd'hui, surtout pour nos jeunes, de commencer à voir un peu de lumière dans ce ciel obscur emprunt de noirceur par une sorte de négativisme et de pessimisme ambiant. Je veux monter qu'on a une histoire très riche ainsi que des repères et des valeurs positives pleines de belles couleurs», conclut-il. S. B.