Le phénomène de l'abstention aux élections n'est pas spécifique à notre pays seulement. Jusqu'aux dernières élections américaines, une telle inquiétude n'a cessé de peser dans un pays où il semblait pourtant nécessaire de tourner la page pour toutes les raisons que nul n'ignore, dont l'embourbement militaire américain en d'autres territoires. Français et Belges ont eu les mêmes appréhensions, l'abstention, allant jusqu'à mettre en doute des élections internes à des formations politiques même. C'est dire si la prochaine consultation nationale suprême donne, au-delà des institutions concernées par rapport à l'opinion internationale, des appréhensions, plus particulièrement aux candidats, c'est sans nul doute la plus légitime des réactions. Ces vingt dernières années, à mesure qu'est passé le temps, l'abstention s'est avérée effectivement le meilleur indice évaluateur de la politique nationale. Ou du moins l'idée que les populations se faisaient des hommes politiques. Incontestablement, si une courbe graphique devait imager les pulsations populaires sur le sujet, il apparaîtrait très clairement que les seules élections auxquelles les électeurs accordent de l'intérêt restent celles appelant à désigner le président de la République. A contrario, celles concernant les élus, de l'Assemblée populaire nationale à la communale en passant par celle de wilaya, ont eu pour dénominateur commun un effilochement sans commune mesure. Jusqu'à remettre en cause l'authenticité, voire la légitimité des résultats obtenus par des élus qui, en réalité, ne l'étaient pas par comparaison au principe du suffrage universel. Or, aujourd'hui ce sont ces mêmes élus désavoués qui appellent au nom de leurs formations politiques respectives les électeurs à accomplir leur devoir quand eux-mêmes ont failli au leur, pervertissant dans la foulée l'exercice de la chose politique et corrodant par extension un acte citoyen qui consistait pour chaque Algérien à faire valoir, avant la notion même du devoir, un… droit. Celui de voter. La nuance, par voie de conséquence, est de taille et ne peut qu'inviter toute la classe politique à revoir sa copie et surtout éviter de culpabiliser dans un rapide procès d'intention des populations, encore moins d'user de paternalisme à l'endroit de citoyens nettement plus matures et généralement, la force de l'habitude aidant, mieux armés politiquement. D'un autre côté, des chefs de parti appellent au boycott des élections, histoire sans doute de justifier, à leur manière depuis des années, qu'ils relèvent et gagnent autrement des élections en apportant… la preuve par neuf qu'il faudrait autrement interpréter les résultats. Une sorte de pilule du lendemain à laquelle ils sont toutefois les seuls à s'arc-bouter et tirer de hâtives conclusions. Et à juste titre en parlant de conclusions, quels sont les enseignements tirés ? Les vrais que tirent ou auraient tirés les animateurs de ces camps qui se livrent à une overdose gesticulatoire une fois toutes les cinq années pour ensuite se fondre dans le plus grand anonymat. Il est incontestable que les formations politiques, même parmi les réputées grosses cylindrées, à quelques exceptions près, sont en nette perte de vitesse. Il y a celles qui s'obstinent à perpétuer l'illusion pour rester dans l'attelage et d'autres plutôt lilliputiennes qui persistent et signent, juste histoire de jauger leur ancrage dans la société et pourquoi pas, peaufiner leur stratégie d'avenir en ce sens que l'élection présidentielle est l'une des rares consultations populaires demeurées encore fiables.Et ce n'est pas faute d'être le champion d'une formation politique digne de ce nom qui a fait que le président de la République ait choisi d'aller à la compétition en qualité de candidat indépendant. A. L.