Quelque 17 millions d'électeurs sont appelés à se rendre aujourd'hui aux bureaux de vote pour accomplir leur devoir électoral. Le feront-ils réellement ? Une telle question taraude aussi bien les 23 partis politiques en lice que le pouvoir, qui semble avoir du mal à se remettre du choc abstentionniste des législatives du 17 mai dernier, lors desquelles le taux de participation a à peine franchi le seuil des 35%. Soit le plus bas de l'histoire de l'Algérie indépendante. Sera-t-il cette fois-ci plus important ? Les partis politiques ainsi que le gouvernement ont fait part de leur inquiétude quant à une abstention massive des électeurs dont le nombre a peu évolué par rapport aux élections locales du 10 octobre 2002 (16,7 millions électeurs). Tout au long des 21 jours de campagne, les leaders des formations en compétition n'ont pas cessé d'insister sur la nécessité que les électeurs aillent aux urnes pour choisir « librement et démocratiquement » ceux qui auraient la charge de gérer leurs communes et leurs wilayas. De son côté, le ministre de l'Intérieur, M. Zerhouni (qui a eu à gérer le référendum sur la concorde civile en 1999, les locales de 2002 la présidentielle de 2004, les législatives de mai 2002 et 2007, le référendum sur la charte pour la paix et la réconciliation nationale de septembre 2005), a appelé les Algériens à se rendre massivement aux urnes « même s'ils glissent des bulletins de vote vierges ». En quelque sorte, le ministre de l'Intérieur préfère avoir des votes blancs que de ne rien avoir. Indifférence Mais les électeurs écouteront-ils son appel ? L'évidence penche vers un non, car on a bien vu les résultats des 4 millions de lettres que son département a adressées à ceux qui auraient oublié d'accomplir leur devoir électoral. 10% seulement auraient répondu à ces missives, qualifiées par des partis d'opposition de « pure opération d'intimidation » qui vise à contraindre les abstentionnistes à renoncer à leur « principe ». Le manque d'engouement pour la campagne électorale corrobore l'hypothèse d'un fort taux d'abstention. Les nombreux meetings animés à travers l'ensemble du territoire national par les différents partis en lice ont suscité peu d'intérêt chez la population qui semble résolue à tourner le dos à toute échéance électorale tant que le renouvellement des assemblées élues ne contribue aucunement à l'amélioration de ses conditions de vie. Une forte abstention entacherait davantage la légitimité des institutions élues – même si dans la loi électorale il n'y a pas de taux minimum pour la validation d'une élection. Fraude De ce fait, certaines formations de l'opposition parlent d'une « fraude » qui se prépare. Le RCD, le FFS et même le MSP qui pourtant fait partie de l'alliance présidentielle ont manifesté leur crainte quant à la répétition du scénario de 1997 et de 2002 où il y a eu « fraude » selon eux. L'un des arguments avancés, c'est le nombre important d'irrégularités constatées dans la validation des listes de candidatures. Mais ils évoquent aussi la suppression de la commission nationale politique de surveillance des élections qui a accompagné toutes les échéances électorales depuis 1997 jusqu'aux dernières législatives. En raison de cela et parce qu'ils ont perdu totalement confiance en les institutions de l'Etat mais aussi en les partis politiques, les électeurs pourraient ignorer ce rendez-vous électoral pour que leur voix ne soient pas détournée. Pour eux, voter ne sert à rien, sinon permettre à de nouvelles figures d'accéder au pouvoir. Les intempéries survenues tout au long de la semaine ont dévoilé la situation catastrophique des 1541 communes du pays, comme elles ont mis à nu les tares de la gestion au niveau local et national. Des ponts nouvellement construits et des chaussées récemment revêtues ont été emportés par les eaux. Des émeutes ont eu lieu il y a quelques jours à Ouargla à cause du chômage qui touche les jeunes, surtout. A cela s'ajoute le malaise social dû à la dégradation du pouvoir d'achat des citoyens sans pour autant que les gouvernants agissent en conséquence.