Dans de nombreux magasins de la ville de Tizi Ouzou, on trouve accrochées aux murs des photos de l'ancienne ville de Tizi Ouzou de la première décennie du XXe siècle jusqu'aux années soixante-dix, signe que beaucoup de gens semblent nostalgiques de la ville de l'époque, même parmi ceux qui ne l'ont pas connue. Non qu'ils regrettent le colonialisme, cela n'est pas vraiment discutable dans une région qui a pris les armes contre l'occupant français, sept longues années avant le premier novembre 1954, mais ils comparent l'état de la ville aujourd'hui et ne peuvent s'empêcher de se rappeler son charme d'antan et la propreté qui y régnait. Ainsi que le civisme qui était en vigueur, il y a moins de trois décennies. Tizi Ouzou était une belle petite ville à l'architecture coloniale. Ses rues étaient droites, séparées de façon parallèle et perpendiculaire, ce qui rendait simple, très simple la circulation en ville pour tout étranger à la recherche d'un endroit bien précis. «C'était une belle petite ville comme on trouvait dans la province française», dit un quinquagénaire qui connaît bien l'Hexagone pour dire aussi que les règles urbanistiques étaient respectées de façon rigoureuse. C'était une petite ville et elle devait apparemment le rester, selon les aspirations des premiers architectes qui y ont travaillé. D'ailleurs, le centre-ville actuel était appelé le village colonial avant l'indépendance. C'est dire que le destin de la ville des Genêts était de rester «petite et mignonne» comme le déclarent souvent les anciens Tizi-Ouziens qui se disent plus que jamais nostalgiques de l'ancienne ville de Tizi Ouzou. «Attention, nous ne sommes pas nostalgiques du parti unique ou du socialisme de Boumediene, mais de la beauté de notre ville et du civisme de ses enfants», prévient l'un des anciens que nous avons interrogés. En effet, avant l'indépendance, la ville de Tizi Ouzou était bâtie sur la base de petites constructions avec au maximum un étage de plus que le rez-de-chaussée. Exception faite de l'immeuble de trois étages, situé actuellement à côté du tribunal de la ville, et qui était occupé par l'un des maires de Tizi Ouzou d'avant-l'indépendance. Des rues et des ruelles parallèles et perpendiculaires favorisaient la visibilité et assuraient un charme indiscutable à ce petit village colonial. Un beau village qui respirait la propreté et le civisme de ses habitants. Deux valeurs qui, bien entendu, survivront à la présence des colons puisque Tizi Ouzou restera belle près de vingt années après l'indépendance. Même avec les extensions qu'elle a connues au lendemain du départ de l'armée française, Tizi Ouzou est restée jolie y compris avec les quelques bâtiments érigés par l'Etat. Jolie et qui sentait la propreté jusqu'au début des années quatre-vingt et le lancement des travaux de réalisation de la «nouvelle ville», une véritable cité dortoir qui a changé toute la donne et ce n'était pas en faveur de la ville ni des citoyens.