Espadrilles Nokia, chaussures de sport Rekbook et survêtements Abibas, les produits contrefaits inondent le marché algérien, tous secteurs confondus. Mais cela est un secret de Polichinelle. Depuis des années, différents organismes et associations tirent la sonnette d'alarme sur ce phénomène. Celle-ci ne cesse de claironner alors qu'elle commence à résonner à partir de 15% aux normes internationales. Selon l'UGCAA, la contrefaçon touche près de 60% des produits commercialisés en Algérie. Ce qui représente un manque à gagner de l'ordre de 30 milliards de DA par an à l'Etat, 200 millions d'euros chaque année, selon une étude de la mission économique française à Alger. Médicaments, habillement, alimentation générale, pièces de rechange… rien n'y échappe même la production intellectuelle. Le secteur de l'informatique subit, lui aussi, pas seulement en Algérie, les méandres de l'hydre contrefactrice. Selon Business Software Alliance, association de défense des droits des développeurs de logiciels, plus de huit logiciels sur dix commercialisés en Algérie sont contrefaits. Ce qui est énorme. Un séminaire international sur la protection des programmes d'ordinateur a commencé ses travaux, hier, et durant deux jours, à la salle Ibn Zeydoun de Riadh El Feth. L'organisation de ce séminaire entre dans le cadre de la commémoration de la Journée mondiale de la propriété intellectuelle, consacrée par l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) et l'Unesco. La ministre de la Culture, Khalida Toumi, a, au cours de son allocution d'ouverture, rappelé l'importance accordée par l'Etat à la protection de la propriété intellectuelle. «L'Etat a consacré en 1997, de manière expresse, dans sa loi sur les droits d'auteur et droits voisins, la protection des programmes d'ordinateurs en les assimilant à des œuvres littéraires écrites et a procédé à la révision de cette loi en 2003 pour la mettre en conformité avec l'accord sur les droits de propriété intellectuelle liés au commerce, dit accord ADPIC», expliquera Mme Toumi. «Ce ne sont pas seulement les Algériens qui sont adeptes du piratage des programmes informatiques ou de logiciels étrangers. Dernièrement, l'ONDA [Office national des droits d'auteurs et droits voisins] a déposé une plainte au niveau de l'instance européenne pour le piratage de programmes algériens et a obtenu gain de cause», informe la ministre. En marge du séminaire, M. Hakim Taousar, DG de l'ONDA, confirme l'information et atteste que plusieurs plaintes similaires ont été déposées par son organisme. «Environ cinq plaintes», déclare-t-il. Pour ce qui est des différentes étapes engagée par l'Algérie pour lutter contre l'atteinte aux droits intellectuels, M. Taousar énumère la révision de la loi en 2005, la réorganisation des missions de l'ONDA et les accords de coopération internationale. «Depuis 2004, nous avons signé deux protocoles d''accord. L'un avec APP [Agence européenne de protection des programmes et l'autre avec BSA [Business Software Alliance]». Pour sa part, la police nationale a créé une nouvelle brigade pour la lutte contre ce genre de contrefaçon. «En attendant, celles de la Gendarmerie nationale et des services des douanes», se réjouit la ministre. Plusieurs intervenants, nationaux et étrangers, spécialistes du domaine doivent prendre part à ces deux journées de travail. L'absence des représentants de l'OMPI n'est pas passée inaperçue. La raison de cette défection a trait au refus des Nations unies de délivrer une autorisation de participation, invoquant des raisons sécuritaires. «Cela me désole. L'ONU a invoqué une raison que l'on ne peut accepter. Mais, nous nous constatons seulement une politique de deux poids, deux mesures. Cette instance n'a pas empêché l'OMPI de se rendre à New York après les attentats de septembre 2001 ou à Londres ou Madrid», s'indigne Mme Toumi. Par ailleurs, pour encourager la production nationale en matière de programmes informatiques, Mme Toumi lance un appel au ministère de la Poste et des TIC ainsi qu'aux partenaires privés et publics pour instaurer un prix annuel national pour la programmation. Le séminaire international sur la protection des programmes d'ordinateur se veut un espace d'échanges et de partage pour renforcer la protection à travers la sensibilisation des institutions et entreprises et la lutte contre la contrefaçon, en tentant de trouver un équilibre entre les droits des propriétaires et le droit des citoyens à acquérir et accéder à la connaissance et à la culture. S. A.