Photo : Zoheïr Par Abdelkrim Ghezali L'idéologie n'est pas un instrument d'écriture et de compréhension de l'histoire d'une nation ou de l'humanité. L'idéologie est un prisme subjectif qui peut déformer les vérités historiques et même les faits scientifiques à des fins de domination, d'acculturation et d'aliénation. Les anthropologues et historiens colonialistes se sont servis de l'idéologie pour «justifier» l'occupation et le pillage de l'Afrique. C'est à ce titre qu'il est impératif de nettoyer l'histoire de tout moule idéologique afin de ne présenter et d'analyser que les faits. Toute approche idéologique est au service d'intérêts occultes, d'un Etat ou d'un groupe d'individus qui s'autoproclament dépositaires de la mémoire collective et de l'intérêt national. Au-delà de ce constat, servir une idéologie au lieu de servir la vérité historique, favorise la déformation des faits et le travestissement des vérités quand on n'utilise pas, comble de l'ironie, les mêmes vérités établies pour justifier des horreurs comme ce fut le cas des nazis et du colonialisme français. Les massacres du 8 mais 1945 s'inscrivent justement du point de vue de l'histoire officielle de la France, dans cette logique sectaire, raciste et arrogante qui consiste à classifier les humains et les nations en fonction d'un ordre préférentiel. A ce titre, la France officielle parle de barbarie quand il s'agit de qualifier les crimes de guerre nazis et d'actes civilisationnels pour évoquer les 132 ans d'occupation de l'Algérie par la France avec tous les crimes et toutes les horreurs. Cependant, en France, des femmes et des hommes d'honneur se sont opposés avec force à la loi du 23 février 2005 qui visait à encadrer l'écriture de l'histoire dans le sens voulu par l'Establishment français. Aujourd'hui, ce sont ces historiens qui mènent bataille pour le devoir de mémoire et qui exigent de la France officielle de reconnaître ses crimes et de faire acte de repentance à l'égard des nations colonisées. L'objectivité dans l'écriture et la lecture de l'histoire s'impose à tous y compris aux historiens algériens qui doivent se débarrasser des relents idéologiques et des partis pris de nature à transformer l'Histoire en anecdotes, notamment quand il s'agit de l'histoire de l'Algérie avant et pendant l'invasion arabe, des actes de pillage et des tueries des bani Hillal, de l'histoire des différentes dynasties berbères ayant gouverné en Afrique du Nord et leur rôle dans le déchirement des nations et dans l'enracinement des clivages politico-idéologiques qui ont façonné le Maghreb d'aujourd'hui. L'histoire d'une nation n'est pas faite uniquement de gloires. Si la guerre d'indépendance nationale est mue par une volonté commune de délivrance, il n'en demeure pas moins que la révolution a également enregistré des dérives graves ayant entraîné des règlement de compte entre frères d'armes, des divisions politiques profondes qui expliquent les contradictions historiques du processus révolutionnaire inachevé et la nature du régime politique algérien toujours en vigueur. Donc, l'Histoire de l'Algérie doit se libérer de l'Etat et des institutions et de leurs exigences idéologiques afin qu'elle soit pleinement assumée en tant que cheminement et mémoire collectifs et non en tant qu'anecdote d'un groupe de personnes ou d'une génération. L'histoire de l'Algérie est aussi vieille que l'Algérie. Elle ne commence pas le 1er Novembre et ne termine pas le 5 Juillet.