Nicolas Sarkozy appelle les Européens à créer une centrale commune d'achat de gaz, une information publiée par le quotidien Gazeta.ru. Est-ce une bonne idée ? A première vue, une telle institution pourrait améliorer la transparence des contrats gaziers, aider à mieux contrôler les livraisons et le transit, ainsi que permettre aux consommateurs de dicter leurs conditions aux fournisseurs, dans une conjoncture marquée par des aléas en matière de fournitures gazières nés de conflits entre Russes et Ukrainiens, ces dernières années. L'initiative du président français semble cependant «assez ambiguë», estiment les experts. La création de la centrale d'achat permettra à l'UE de former un front uni au cours des négociations, indique Alexandre Chtok, directeur du département Due Diligence de 2K Audit Delovye konsoultatsiï, cité par la Gazeta.ru. S'étant mis d'accord avec un fournisseur, l'UE serait en mesure de faire pression sur les autres en se fondant sur des contrats signés. Gazprom pourrait se heurter dans ce cas à une réduction des prix de sa production en Europe se soldant par la chute de ses recettes, affirme, dans la même publication, Dmitri Lioutiaguine, analyste en chef de la société d'investissements Veles Kapital. Il n'est cependant pas sûr que cette initiative soit dirigée contre Gazprom : si la centrale constitue une sorte d'équivalent de la bourse réunissant de nombreux fournisseurs et consommateurs, cela permettra au contraire de détacher les prix du gaz des cotations du pétrole. L'idée est plutôt destinée à élever la transparence des contacts et à renforcer le contrôle du transport, estime Dmitri Alexandrov du groupe d'investissements Financial Bridge. L'Europe tente d'éviter la répétition de la situation du début de l'année, où un certain nombre de pays de l'UE sont restés sans gaz durant près de deux semaines à cause du conflit russo-ukrainien, ajoute-t-il. Dans cette situation, l'initiative perdra tout son sens sans participation de Kiev à la création de la centrale. Et, cela est désavantageux pour l'Ukraine : elle sera obligée d'assumer ses responsabilités et de répondre devant ses partenaires européens en cas d'excès. La proposition du président français comprend également encore un trait ambigu. Une bourse gazière centralisée constitue justement l'instrument qui manque à la création d'une «l'OPEP gazière». L'apparition de la centrale commune d'achat de gaz éliminera en fait tous les obstacles à la formation du cartel des fournisseurs, explique Chtok, dans Gazeta.ru. La seule mention de l'Opep gazière irrite passablement les fonctionnaires européens.