Fait marquant de la prochaine réunion de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), prévue pour le 28 mai, la Russie ne sera pas présente. L'information a été fournie hier par l'agence moscovite Ria Novosti qui cite le ministre russe de l'Energie, Sergueï Chmatko. Ce dernier a, en effet, avancé qu'ils (les pays OPEP) vont s'occuper «exclusivement de questions techniques internes», et qu'ils ne devraient pas discuter «d'une réduction» de la production. Il s'exprimait à Khabarovsk (Extrême-Orient russe), en marge d'un sommet UE-Russie. Il est fort possible que la fédération de Russie n'ait pas été invitée à cette rencontre, chose dont le ministre russe ne pouvait pas parler. Non sans raisons : depuis quelques mois, il y a comme un froid dans les rapports entre la Russie et l'OPEP, car l'organisation pétrolière reproche à Moscou de n'avoir pas réduit sa production, en application des décisions de baisse qu'elle a prises, fin 2008. A quoi bon faire participer des pays non OPEP qui ne respectent pas leurs engagements, notent souvent des responsables de l'OPEP. Moscou avait dépêché d'importantes délégations, avec à leur tête le vice-Premier ministre Igor Setchine, lors des deux réunions précédentes, le 17 décembre 2008 et le 15 mars 2009. Au cours de la rencontre du 17 décembre à Oran, l'on s'en souvient, Moscou avait promis d'opérer une coupe dans son volume de production. Mais, apparemment, il n'en est rien sur le terrain, les Russes, qui voient leurs recettes en devises diminuer en raison de la détérioration des marchés pétroliers, ne voulant pas resserrer les vannes. Dans le discours officiel, c'est autre chose : il est souvent affirmé que la Russie continue de contribuer aux efforts de l'OPEP afin de faire remonter les prix de pétrole, en réduisant de 5,2% sa production en 2008 par rapport à 2007. Vrai ou faux ? Les chiffres officiels montrent que sa production de pétrole et gaz condensés a rebondi en avril, une information qui risque justement d'être accueillie par les pays membres de l'OPEP avec «frustration et, probablement, avec une colère croissante», notait récemment l'analyste Chris Weafer de la banque Uralsib. La Russie continue, en vérité, et elle n'est pas la seule dans ce cas, à pomper et à tirer profit des réductions successives effectuées par l'OPEP. On est ainsi loin de l'euphorie ayant caractérisé en 2008 les relations entre les deux parties : on évoquait même une adhésion de la Russie à l'OPEP. Que des spéculations ! La Russie, deuxième producteur mondial de brut derrière l'Arabie saoudite, n'est pas membre de l'OPEP, à laquelle elle s'est toutefois associée dans le passé pour tenter d'influer sur les cours du pétrole. Avec ou sans la Russie, les cours de pétrole sont repartis à la hausse. Hier, le baril de brut a grimpé à 61,82 dollars, non loin de son record de 62,30 dollars atteint mercredi 20 mai. Le pétrole pourrait bien terminer la semaine en hausse de l'ordre 9%, à ses cours actuels. Certes, sur la même période, l'indice d'action S&P 500, avec lequel le brut est fortement corrélé actuellement, reste pratiquement inchangé. En revanche, le dollar a enregistré un net recul contre la plupart des autres devises, en raison des craintes de dégradation de la notation crédit de l'Etat fédéral américain. La monnaie unique européenne a gagné près de 3,5% contre le billet vert sur la semaine. Plus que les marchés d'actions, ce sont aujourd'hui les variations de change qui tirent le cours du baril à la hausse. Puisque le pétrole est libellé en dollars à titre principal, une baisse marquée du billet vert incite à l'achat. De plus, le 28 mai prochain, l'OPEP devrait laisser inchangés ses quotas de production pétrolière. Un consensus est en train de se dégager sur cette question. Y. S.