«Ne pas entrer dans l'engrenage du tabac» et «faire renoncer ceux qui ont déjà commencé» à fumer sont les deux objectifs majeurs du programme d'aide des adolescents, lancé par l'Association aide aux malades (ADAM) dans 18 collèges d'enseignement moyen. «Classe sans tabac», tel est l'intitulé de ce programme qui vise, selon le professeur F. Skandar, chef de service des urgences des maladies respiratoires et initiatrice du projet, à lutter contre le tabagisme chez les jeunes qui est en augmentation alarmante. «Plus spécifiquement, le projet vise à aider les jeunes à ne pas entrer dans l'engrenage du tabac et à faire renoncer ceux qui ont déjà commencé», a réaffirmé le Pr. Skandar, en expliquant que, pour ce faire, le projet donne la possibilité aux adolescents de réfléchir et de s'exprimer sur l'influence de leur entourage par rapport au tabac et sur les stratégies des multinationales qui profitent de la libéralisation des échanges pour accroître leur présence dans des pays où les politiques de lutte contre le tabagisme sont insuffisantes, en ciblant particulièrement les jeunes. Des adolescents ayant entre 11 et 14 ans fument ou consomment du tabac à chiquer, dira l'interlocutrice, d'où le projet «Classes sans tabac» qui ambitionne de réaliser un impact durable et significatif en Algérie sur le nombre de jeunes consommant du tabac, sur l'âge du début du tabagisme, sur l'intensité de la consommation, etc. Tous ces facteurs auront, du moins, des répercussions favorables sur la mortalité due au tabac, notamment pour cette catégorie. Sept wilayas concernées par le projet Ainsi, 18 CEM, répartis sur 7 wilayas du pays : Aflou, Alger, Adrar, Tizi Ouzou, Mostaganem, Sidi Bel Abbès et Constantine ont adopté ce programme, soit 125 classes et un nombre d'élèves ne dépassant pas les 4 000. Il y a lieu de rappeler que, l'année précédente, seuls trois CEM d'Alger et deux de Tizi Ouzou ont adopté ce programme, soit au total 24 classes et 800 élèves. Ainsi, l'initiatrice du projet a prévu de doubler le nombre des classes impliquées l'année prochaine. Pour l'application de ce programme «classes sans tabac», des ateliers de formation ont été dispensés dans certains CEM. Il s'agit, selon le Pr. Skandar, de quatre ateliers programmés pour quatre mois. «L'enseignant dispense chaque mois un atelier, d'une durée variant entre 45 min et une heure», expliquera-t-elle, en ajoutant que «chaque atelier a sa spécificité». Ces ateliers, selon elle, constituent une communication interactive qui permet aux jeunes d'exprimer leurs connaissances ou leurs opinions, mais aussi de développer des choix et d'avoir un raisonnement critique. Un débat ouvert entre l'enseignant et l'élève L'enseignant, dans le premier atelier intitulé « fumeur automatique», montre à ses élèves les effets à court terme du tabagisme sur la santé et ce, avec de petites expériences. Le deuxième atelier traite «influence et manipulations», ce qui permet aux élèves de réfléchir et de s'exprimer librement. «L'enseignant dans ce cas-là ne doit ni juger, ni faire la morale, ni critiquer son élève, il doit le laisser parler et donner son avis librement», dira à ce propos le professeur Skandar. Dans le troisième atelier, «le jeu des opinions», le maître de la classe encourage l'adolescent à exprimer son opinion, à prendre position en confortant son argument et corrige l'idée que l'élève se fait du tabac. L'objectif du quatrième et dernier atelier de travail, «comment dire non au tabac», est d'apprendre à l'élève adolescent à dire non au tabac, à reconnaître les différentes pressions qui poussent à sa consommation et, enfin, de proposer des arguments pour la refuser. Par ailleurs, les arguments développés par les uns et les autres permettront de renverser les images valorisantes liées au tabac en général et à la cigarette en particulier. Elle a d'ailleurs, conseillé aux enseignants d'éviter des propos moralisateurs et l'argumentation par la peur, le danger pouvant avoir un effet incitateur chez l'adolescent. Pour développer un comportement constructif et positif, le professeur a préconisé le respect de certaines règles : l'animateur est responsable du bon déroulement de l'activité qui doit être ludique, les élèves doivent exprimer leurs opinions en toute liberté, les élèves et l'animateur ne doivent ni juger ni critiquer, les opinions et les attitudes de chacun doivent être respectées par les deux parties et, enfin, toute violence verbale physique est interdite. Pour atteindre l'objectif de ce projet et programme, une implication vigoureuse de tous les acteurs du secteur de l'éducation et des parents est primordiale, réclamera avec insistance Mme Skandar. Notons, par ailleurs, que dans le cadre de ce programme, un concours est organisé chaque année dans les collèges concernés dont les élèves s'engagent, par un «contrat collectif», à ne pas consommer de tabac pendant toute la durée du concours au moins quatre mois, début janvier-fin avril. Un «élève responsable» désigné au sein de chaque classe concurrente doit informer tous les mois l'association sur les rapports de sa classe avec le tabac. «Ce contrat est basé sur la confiance», a souligné le Pr. Skandar, membre de l'association ADAM. Les élèves sont également invités à «développer des œuvres créatives» sur le thème «pour un monde sans fumée». Il peut s'agir de dessins, d'affiches, de jeux divers, de pièces de théâtre, de chansons, de poèmes ou de textes. Les collèges bénéficient d'un financement qui leur permettra de réaliser leurs travaux et les meilleures créations seront récompensées par un jury à l'occasion de la célébration de la Journée mondiale sans tabac. Pour cette année, la date est fixée au 15 juin. Pour rappel, «Classes sans tabac» est une adaptation en Algérie du programme européen du même nom (Smoke Free Class) développé actuellement dans vingt-deux pays. Salim Iles, champion algérien de natation, est le parrain de ce projet. «Classes sans tabac» a en outre le soutien des ministères de l'Education nationale, de la Jeunesse et des Sports, de la Santé, ainsi que du Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef). Le projet répond donc à un besoin majeur. «La prévention primaire s'impose», a conclu le professeur Skandar. Pour en savoir plus, consultez : www.classessanstabac.org N. B. Cigarettes light : l'industrie du tabac a sciemment dupé les fumeurs Une cour d'appel fédérale américaine a estimé que l'industrie du tabac avait sciemment trompé les fumeurs en s'entendant pour labelliser des cigarettes «légères» alors qu'elles sont aussi nocives pour la santé. La cour d'appel de Washington a confirmé un jugement de première instance rendu en août 2006, selon lequel les cigarettiers ont menti pendant des dizaines d'années sur les effets nocifs du tabac. Elle a également confirmé la décision de la juge fédérale de première instance de les obliger à retirer les mentions «trompeuses» comme «légères» ou «naturelles» des paquets de cigarettes.