Photo : Riad Par Abdelghani Aïchoun S'il y a un fait qui a caractérisé cette saison footballistique, c'est bel et bien le phénomène de la violence dans les stades, sous ses différentes formes, qui a persisté, d'une manière ahurissante, malgré les efforts consentis par les différents responsables ou instances. Et pour s'en convaincre il n'y a qu'à voir le nombre de matches de championnat, de division une ou deux, qui se jouent, chaque semaine, à huis clos, et ces rencontres où l'on constate des jets de projectiles. Des spectacles déplorables sur la pelouse Récemment, un match de championnat de l'élite, qui a opposé à Chlef, l'ASO à la JSK, a été arrêté avant terme (à la 74e minute) par l'arbitre en raison de l'insécurité qui régnait dans le stade. L'empoignade était diffusée en direct par la télévision algérienne et tous les téléspectateurs ont eu à suivre, pendant plusieurs minutes, ce mauvais «spectacle». La commission de discipline a réagi en octroyant les points du match aux visiteurs et en sanctionnant le club hôte à jouer quatre rencontres sans son public. D'autres matches encore ont connu des incidents similaires. Même les grands rendez-vous, tant nationaux qu'internationaux, n'échappent pas à cette logique. Le 21 mai dernier, à l'occasion de la finale de la Coupe d'Algérie, des supporters ont failli être lynchés par d'autres à la fin du match qui avait opposé le CABBA au CRB. Certains parlent même de plusieurs dizaines de blessés. Du comportement des joueurs sur le terrain à celui des supporters dans les tribunes ou en dehors du stade, le football algérien est devenu synonyme de violence. Il faut rappeler que, depuis son arrivée, ou plus précisément son retour, à la tête de la Fédération algérienne de football (FAF), durant le mois de février dernier, M. Mohamed Raouraoua a fait de la lutte contre la violence dans les stades l'une de ses priorités. Dans ce cadre, dès sa prise de fonction, il s'est attelé à revoir la réglementation en ce qui concerne les sanctions disciplinaires, lesquelles ont toutes, été, alourdies. Ainsi, l'article 71 du code disciplinaire prévoit jusqu'à un an de suspension ferme dans le cas d'une agression, envers un joueur ou un dirigeant, «avec lésion corporelle causant une incapacité égale ou supérieure à quinze jours délivrée par un médecin légiste». Pour ce qui est d'un comportement incorrect envers officiels de matches, la sanction est encore plus lourde. L'article 74 du même texte prévoit, à cet effet, une sanction de deux ans de suspension, quand il s'agit d'agression sans lésion corporelle, jusqu'à la radiation à vie pour l'agression «avec lésion corporelle causant une incapacité égale ou supérieure à quinze [15] jours délivrée par un médecin légiste». La FAF a également instauré une nouvelle sanction : la contestation de la décision de l'arbitre par un joueur ou un dirigeant est sanctionnée par un carton jaune et un match ferme. D'autre part, les sanctions par le huis clos se sont multipliées depuis le retour du duo Raouraoua-Mecherara. Mais est-ce que toutes ces mesures ont pu atténuer les effets de la violence dans les stades ? Le durcissement de la réglementation suffira-t-il ? Il faut dire que le problème est tellement profond qu'il ne suffit pas de faire passer de nouvelles réglementations pour en venir à bout bien qu'elles soient toujours utiles. Récemment, plusieurs présidents de club ont demandé aux responsables fédéraux de surseoir à la sanction par le huis clos. Il est vrai que ceux-là sont beaucoup plus préoccupés par l'aspect financier de la chose puisque, dans le cas d'un huis clos, ils seront, automatiquement, privés de rentrées de stades qui s'élèvent quelquefois à des dizaines de millions. Mais, à défaut d'une alternative, cette sanction restera toujours d'actualité. D'ailleurs, lors de son passage, il y a deux semaines, au forum de la télévision algérienne, le président de la FAF est allé dans ce sens en indiquant qu'il n'y a pas, pour l'instant, d'autres sanctions possibles hormis le huis clos et les amendes financières. La nécessaire réforme du sport et des mentalités Sans pour autant être «alarmiste», quoique les circonstances l'y obligent, il faut dire que la violence dans les stades est devenue un phénomène assez dangereux qu'il faut impérativement combattre. Certains supporters des clubs algériens n'admettent plus la défaite. Au moindre «couac» de leur équipe, c'est l'émeute. Même si certains éléments, à l'image de la mauvaise gestion des infrastructures sportives, ou l'inadéquation de ces dernières dans certains cas, sont des facteurs aggravants, croire néanmoins qu'un meilleur stade, réalisé selon des normes bien précises, réglerait ce problème est un raccourci. C'est tout le football national qui est en déchéance depuis plusieurs années. La lutte contre la violence dans les stades devrait, avant tout, s'inscrire dans une logique globale de réforme du sport roi en Algérie. Seule l'amélioration du niveau de cette discipline, et par conséquent, le changement des mentalités, que cela soit chez le dirigeant, le technicien ou le footballeur, pourrait impulser de nouveaux comportements chez le supporter. C'est toute la gabegie dans laquelle évolue notre football –ajoutant à cela, bien sûr, les conditions socio-économiques assez difficiles dans lesquelles évolue une frange de la jeunesse– qui fait que certains supporters développent un «dégoût» qu'ils n'expriment que par la violence.