Sur les vingt-trois rencontres officielles et amicales ayant mis face-à-face l'Algérie et l'Egypte, de 1963 à 2004, il y a eu onze matches nuls, cinq matches remportés par l'Egypte et 7 remportés par l'Algérie. Sur les cinq matches gagnés par l'Egypte, aucun ne l'a été en Algérie. C'est face à son public que l'équipe égyptienne bat l'Algérie. En revanche, l'Algérie a gagné trois matches en Egypte. Ces chiffres sont assez éloquents sur la nature des affrontements sportifs entre l'Algérie et l'Egypte. Si, pendant la guerre de libération et les trois premières années de l'indépendance, les relations entre Alger et Le Caire se caractérisaient par une sorte d'allégeance favorisée par les choix personnels de Ben Bella à l'égard de Djamel Abdennasser qui a pesé dans les choix politiques de l'Algérie, notamment lors du Congrès de Tripoli, les options stratégiques de Boumediene après le coup d'Etat de 1965 ont placé l'Algérie sur une trajectoire régionale et internationale qui commençait à gêner l'Egypte, alors centre du monde arabe et musulman. Ainsi, une sorte de compétition politique commença à prendre forme entre les deux pays même si l'Algérie n'a jamais lésiné sur les questions liées «au destin commun» comme les guerres de 1967 et de 1973 où l'Algérie s'est investie corps et âme auprès de l'Egypte. Après les bouleversements géopolitiques générés par les accords de Camp David et l'avènement du «Front du refus», l'Algérie s'est retrouvée aux côtés de la Syrie à l'avant-garde de la résistance arabe face à Israël et aux Etats-Unis. La période de l'isolement de l'Egypte n'a pas pris fin avec l'assassinat d'Anouar el-Sadate et la réhabilitation du Caire comme capitale des Arabes n'eut lieu qu'après la chute du Mur de Berlin et les accords d'Oslo ayant normalisé, vaille que vaille, les relations entre Israël et certains pays arabes. C'est dans cette même période que l'Algérie, Mecque des révolutionnaires, entame sa traversée du désert au plan interne à la suite d'une tragédie qui allait l'occuper pendant une dizaine d'années et au plan international et de ses choix difficiles sur la question palestinienne qui demeurent, néanmoins, fidèles aux principes fondateurs de la diplomatie nationale et aux engagements historiques de l'Algérie aux côtés des Palestiniens. L'Egypte n'a jamais accepté de perdre son leadership régional et continental, même si, au plan africain, l'Algérie, même dans les moments les plus difficiles, n'a jamais perdu la main et a continué à jouer un rôle d'Etat pivot jusqu'à l'avènement de l'UA dont la genèse s'est articulée sur l'axe Alger-Abuja-Johannesburg. C'est à ce titre aussi que toutes les occasions sportives, politiques et économiques où se rencontrent l'Algérie et l'Egypte, sont vécues, au-delà de leur nature propre, comme des compétitions entre deux puissances régionales. La compétition de demain qui est un derby nord-africain, dont l'importance ne devrait pas dépasser les enjeux sportifs, a commencé en Egypte depuis l'annonce du rendez-vous entre les deux équipes, avec une bataille psychologique sans merci menée aussi bien par l'entraîneur des Pharaons que par la presse cairote. Si, pour l'Algérie, la rencontre de demain est un test sérieux pour le football algérien qui tente de sortir du marasme dans lequel il est plongé depuis le début de la tragédie nationale, pour l'Egypte, ce rendez-vous sportif prend une dimension politique capitale comme si le devenir du régime égyptien en dépendait, alors qu'au plan économique et social, l'Egypte connaît des moments difficiles exacerbés par la crise mondiale. A. G.