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Les architectes recommandent la nomination d'«un Monsieur parachèvement» au gouvernement Tout en contestant les carences de la loi 08-15 du 20 juillet 2008
La loi 08-15 du 20 juillet 2008 portant mise en conformité des constructions en vue de leur achèvement est au cœur d'une intense polémique. Les experts architectes et les ingénieurs en urbanisme montent au créneau pour réclamer un complément à cette loi que certains d'entre eux n'hésitent pas à qualifier «d'inapplicable». Lors d'un débat organisé hier au forum El Moudjahid sur le dossier des constructions inachevées et la difficulté de mise en application du décret exécutif paru le 6 mai dernier au Journal officiel, les architectes ont interpellé les représentants du ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme sur les carences de ce texte de loi très controversé. En effet, cette loi qui oblige tout propriétaire d'un terrain en construction de «finir» le chantier qu'il a entamé est entourée de plusieurs zones d'ombre. Si l'objectif de cette mesure est de résoudre le problème des constructions inachevées qui poussent comme des champignons dans nos villes, il n'en demeure pas moins que celle-ci peut entraîner un autre désordre en régularisant des constructions illicites, lesquelles enlaidissent le tissu urbain. «Si cette loi n'est pas complétée et appliquée en respectant les instruments de l'urbanisme, elle risquerait de nous faire revivre le cauchemar de mai 2003. Elle souffre de plusieurs carences en matière géologique. Il ne faut surtout pas parachever n'importe quelle construction inachevée. Les constructions bâties sur les lits d'oued ou sur des terrains non conformes n'ont pas à être régularisées. De telles constructions sont très dangereuses», avertit M. Chelghoum, expert architecte qui appelle à doter toutes les communes d'une carte des risques sismiques. Concernant le dossier du parachèvement des constructions inachevées, notre interlocuteur, à l'instar de beaucoup d'autres architectes présents lors de ce débat, recommande la nomination «d'un Monsieur parachèvement au gouvernement» avec lequel les bureaux d'études, les architectes et l'administration locale travailleront pour prendre en charge ce dossier épineux. En clair, les architectes souhaiteraient qu'un secrétariat d'Etat soit créé pour gérer cette opération de mise en conformité des constructions inachevées. «Il s'agit-là d'un phénomène terrible qui dépasse de loin les capacités de l'administration. Aujourd'hui, des gens construisent des baraques et font couler juste après des dalles. Ils vont dès lors demander la mise en conformité de leurs constructions. Est-ce normal ?», s'interroge pour sa part Lounasi Saïd, ingénieur en urbanisme et architecte qui craint que cette loi régularise de ce fait des constructions dont les propriétaires ne disposent ni d'un permis de construire ni d'un titre de propriété. Par ailleurs, d'autres architectes craignent aussi que la mise en conformité des constructions inachevées ne défigure davantage nos villes. «Nous assistons à la construction sans architecture. Les retards dans la réalisation des logements entraînent leur surcoût. C'est ce qui explique la cherté du logement dans notre pays. Par conséquent, le citoyen se rabat sur la construction illicite. Dans ce contexte, nous avons besoin d'une loi qui comprenne une vision globale de la ville sachant que seulement 5% des permis de construire sont accordées à des constructions conformes», relèvent-ils. De son côté, M. Boudaoud, président du Conseil national des experts architectes, dénonce la passivité et «l'incompétence» des directions de l'urbanisme et de la construction (DUCH) lesquelles font rarement des sorties sur le terrain pour s'assurer de la conformité des constructions. «La plupart des APC n'ont aucun architecte ou un ingénieur en urbanisme dans leurs services. Et pourtant, le pays compte au moins 12 000 ingénieurs, soit près de 8 ingénieurs par commune», affirme M. Boudaoud qui ne comprend pas pourquoi les architectes n'ont pas été associés dans l'élaboration de cette nouvelle loi. Quant à la directrice de la réglementation et de la construction au ministère de l'Habitat, Saliha Aït Mesbah, et le directeur de l'architecture et de l'urbanisme, M. Aït Saada, présents à ce débat, ils rétorqueront que la loi 08-15 du 20 juillet 2008 est renforcée par «des textes accompagnateurs». «Des documents graphiques et écrits doivent être fournis lors de la demande de mise en conformité que le citoyen doit présenter aux commissions de daïras», précisent-ils tout en annonçant qu'une instruction ministérielle sera lancée la semaine prochaine demandant le recensement de tous les cas d'espèces des constructions inachevées et ce afin de leur apporter les réponses appropriées. A. S.