La loi relative au parachèvement des constructions inachevées continue de susciter une vive polémique au sein de la corporation des architectes. Hier, lors d'une table-ronde organisée au centre de presse d'El-Moudjahid et portant sur la régularisation des constructions inachevées, des architectes sont montés au créneau pour dénoncer les carences de ladite loi qui, relèvent-ils, n'apportera guère une solution à la problématique des constructions inachevées dans notre pays. «Cette loi est incomplète dans la mesure où elle met dans le même panier tous les types de constructions existantes. C'est la un dangereux piège car les pouvoirs publics s'apprêtent à donner un quitus à tous les propriétaires des constructions illicites en faisant fi des risques sismiques et des constructions érigées sur les lits d'oueds», souline M. Chelghoum Abdelkrim, professeur en génie parasismique. Pour notre interlocuteur, il est urgent de procéder à une identification des constructions par zones afin d'identifier les différents risques auxquels elles sont exposées avant d'entamer toute régularisation. «Le ministère de l'Habitat parle de 1,2 million constructions inachevées. Moi je pense qu'elles peuvent atteindre deux millions d'ici peu vu l'ampleur de ce phénomène. C'est donc un problème complexe qui nécessite l'implication et l'expertise des architectes et des urbanistes. Sans ces derniers, la régularisation sera un échec», ajoute M. Chleghoum Abdelkrim. Quant à M. Hamid Boudaoud, président du Collège national des experts-architectes, il abonde dans ce sens et dénonce l'exclusion des architectes lors de l'élaboration de ce texte de loi. «Laissons l'architecte faire ce qu'il doit faire», clame-t-il, insistant également sur l'importance d'une cartographie complète du patrimoine immobilier inachevé. «Nos villes sont hideuses parce que les études des architectes ne sont jamais respectées lors de la réalisation des habitations», assure Hamid Boudaoud pour lequel dans chaque commune un architecte devrait contrôler les travaux publics et les besoins en matériaux de construction afin que les deniers ne soient pas dilapidés ou détournés dans des projets publics. De son côté, Mme Aïcha Ouada, secrétaire générale du Conseil national de l'Ordre des architectes, a estimé que la loi relative à la régularisation des constructions inachevées est entourée d'opacité. «Nous les architectes, refusons de participer à la mise en œuvre de ce texte tant que des éclaircissements ne sont pas présentés. Et cela nécessite avant tout un assainissement foncier car nous avons souvent affaire à des constructions illicites érigées sur des terrains dont on ne connaît pas la nature judiciaire», explique-t-elle. Enfin, des représentants de l'ordre des architectes d'Alger se sont insurgés contre ce texte de loi. «Nous avons déposé au niveau de l'APN 32 amendements contre ce décret. Mais aucun n'a été pris en compte. Aujourd'hui, on nous dit que seules les constructions réalisées dans le cadre du plan directeur d'aménagement et d'urbanisme (PDAU) ou du plan d'occupation des sols (POS) seront régularisées. Alors qu'allons-nous faire d'El Hamiz, une ville entièrement illicite ? Allons-nous régulariser les 20% de constructions illicites qui se trouvent dans les lits d'oueds ? La vérité est que ce texte de loi occulte les responsabilités des pouvoirs publics dans ce dossier très lourd», concluent-ils. A. S.