Les chances de consécration dans le Championnat algérien de football se mesurent apparemment à l'épaisseur du portefeuille consacré au recrutement. Un peu plus d'un mois avant le début officiel de l'exercice 2009/2010, les présidents de club étalent ostensiblement leurs dizaines de milliards, nets d'impôts, dans ce gros souk de l'intersaison. Les enchères sont extrêmement serrées. Le spectacle ressemble, à s'y méprendre, à celui qui s'offre au citoyen ordinaire à la veille de la fête de l'Aïd avec la cherté excessive se saisissant, alors, des marchés à bestiaux. Même la JSK, le club le plus titré du pays, n'arrive plus à garder ses poulains. A ce jeu, le boss canari a été complètement laminé par des concurrents qui tirent sur tout ce qui bouge. Le club kabyle a été en effet «dépossédé» d'au moins six titulaires. Pour couvrir toutes ces défections, Hannachi a dû recourir en catastrophe à la prospection dans les petits clubs de la région. Ainsi, deux sociétaire de l'ORB Akbou et deux autres de l'US Amizour ont officiellement signé pour les Vert et Jaune. A défaut de disposer de fonds suffisants pour appâter les recrues les plus en vue, la direction de la JSK est allée sonder les petites formations à la recherche de la perle rare. On semble revenir aux bonnes vieilles méthodes qui consistent à enrôler les bons éléments des divisions inférieures dans l'espoir de parfaire leurs performances individuelles. Si ce choix est louable en soi, il doit être cependant l'émanation d'une réelle conviction et la traduction d'une politique efficiente de formation et d'homogénéisation des effectifs. Cela ne semble pas être le cas pour Hannachi qui, lors des exercices précédents, s'était volontairement prêté à ce vilain jeu de la surenchère financière. Cela dit, les patrons des équipes de l'élite se comportent comme des maquignons sur une aire de marché qui n'offre pas beaucoup de choix. Ils rivalisent, à coups de milliards, pour s'adjuger les services de footballeurs tout juste moyens. Pour preuve, l'équipe nationale, qui fait en ce moment un excellent parcours dans les qualifications jumelées CM-CAN 2010, ne compte que sur des joueurs professionnels évoluant pour l'essentiel en Europe. C'est tout juste si le sélectionneur national, Rabah Saadane, aligne, pour la forme, deux à trois joueurs locaux par rencontre. Cette année, les écuries les plus «friquées» ont donc mis le feu au marché des transferts avec des sommes colossales en circulation. L'ES Sétif a mis une cagnotte de 40 milliards de centimes sur le tapis ; l'USM Annaba suit avec un gros paquet de 23 milliards de centimes ; le MC Alger tient les paris et compte, lui aussi, prendre une bonne position dans ce championnat ridicule des gros chèques. Même en Super D II, seul l'argent fait la loi. L'éthique sportive –voire les règles élémentaires de la bienséance- est effrontément piétinée dans cette grande foire de l'indécence. Le simple citoyen se demande d'où vient toute cette manne. Les subventions publiques, les sponsors et les cotisations des supporters ne suffisent visiblement pas à créer une telle «Bourse». Dans les cafés populaires et les forums Internet, les discussions ne tarissent pas sur ce fantastique sujet. Certains parlent de blanchiment d'argent sale, d'autres évoquent des détournements de fonds sociaux, chacun y va de son propre pronostic pour s'expliquer cette surprenante aisance financière des clubs qui, hier encore, criaient à la faillite. La seule évidence est que ce plafonnement consenti des montants des transferts profite exclusivement aux dirigeants, aux agents de joueurs et aux footballeurs eux-mêmes qui se sucrent sur le dos des catégories inférieures. Il est grand temps de réfléchir à contrôler et à réglementer ce juteux marché des transferts pour couper la voie à l'escroquerie et à l'enrichissement illégal. L'argent des clubs doit profiter au football. Les minimes, les cadets et les juniors doivent également en disposer. Il y a aussi urgence à enquêter sur la provenance de l'argent et son utilisation. Le payement des impôts et des dettes contractées devrait prévaloir. Un grand travail d'assainissement reste en effet à faire. Les instances fédérales et associatives du football, la tutelle et les institutions de l'Etat sont interpellées pour garantir, d'abord, les intérêts du contribuable et agir, en suite, dans le sens de promouvoir et de développer le sport roi en Algérie. L'anarchie actuelle ne bénéficie qu'à certaines têtes qui sont visibles de tous. K. A.