«Le roi est mort, vive le roi !» C'est par cette cynique réflexion qu'on pourrait résumer l'impression que dégageait le siège du Front de libération nationale (FLN) en cet après-midi de lundi 30 juin, officiellement jour du retour du secrétaire général, Abdelaziz Belkhadem, des Lieux saints où il s'était rendu quelques jours auparavant pour y effectuer une omra. Si certains responsables du parti se trouvaient ce jour-là à l'Assemblée populaire nationale (APN) où se déroulaient les élections pour le renouvellement du groupe parlementaire du FLN, d'autres avaient déserté le siège pour des motifs différents. Lorsque nous demandons si les membres du cabinet de Belkhadem sont présents, la réponse est tout aussi négative. «C'est ainsi depuis l'annonce du remplacement de Belkhadem par Ouyahia, ils sont souvent absents et ceux qui avaient l'habitude de rendre visite au parti ont tous disparu. Ils sont comme cela au FLN, ils n'attendent que l'occasion pour en finir avec la tête du parti maintenant qu'il n'est plus chef de gouvernement !» Celui qui tient ce discours occupe juste un modeste poste au sein de cette formation mais les quelques années qu'il y a passées lui permettent de se faire une idée bien précise du fonctionnement du plus vieux parti, un fonctionnement, dira-t-il, qu'on pourrait bien résumer à travers cette citation populaire «Maa louakef» (du côté des plus forts). Les commentaires et autres spéculations ayant immédiatement suivi le départ de Belkhadem de la tête de l'Exécutif sont en tout cas allés dans ce sens, corroborés en cela par les déclarations des uns et des autres. Une certaine agitation est perceptible depuis le changement opéré, de sorte à nous faire rappeler les tensions épisodiques qu'a eu à traverser le parti ces dernières années. Selon certaines indiscrétions proches du parti, il semblerait que la tenue du Conseil national et du congrès extraordinaire, pourtant inscrits depuis un temps dans l'agenda du parti, soient compromis. «La tenue du congrès pourrait particulièrement entraîner l'éviction du secrétaire général actuel par l'aile qui lui a toujours manifesté sa désapprobation, d'où sa réticence à la maintenir !» nous confie-t-on. Quand on pose la question à Said Bouhadja, le porte-parole du parti, ce dernier se veut rassurant et affirme que tout ce qui était prévu par le parti se fera, à savoir la tenue du conseil national et du congrès extraordinaire immédiatement après l'approbation du Parlement du projet de révision constitutionnelle. «Nous avons mené, depuis deux ans, une activité intense en faveur de l'aboutissement de ce projet et nous sommes tenus par l'article 21 des statuts du parti de tenir le Conseil national et le congrès extraordinaire pour présenter la candidature de Bouteflika à un troisième mandat. Nous n'allons d'ailleurs pas attendre que celui-ci se prononce pour le faire, nous allons le devancer !» tient à préciser notre interlocuteur. Ce dernier se félicite, par ailleurs, que le projet tant défendu par son parti soit aujourd'hui approuvé et soutenu par l'ensemble des membres de l'Alliance présidentielle et de la majorité de la classe politique. «Ouyahia a renforcé ce qu'a fait jusque-là le FLN en déclarant soutenir l'amendement du texte fondamental du pays ainsi que la réélection du chef de l'Etat pour un autre mandat», ajoute notre interlocuteur. Faisant partie des plus importantes figures du passé et du présent du parti, Abdelkader Belayat, qui nous a reçus hier au siège du parti, développe un discours propre à un militant, dit-il, «amoureux du parti» et soucieux de son «unité». Il se refuse ainsi «à ajouter un point de vue qui risque d'accentuer la désorganisation» car ayant pour «religion» la cohésion du parti. Il se prononce contre les «prétentions personnelles» des uns et des autres dès lors, estime-t-il, que cela s'apparente inévitablement à de la subjectivité au détriment de l'intérêt général du parti. S'agissant du remplacement de Belkhadem à la tête de l'Exécutif, notre interlocuteur pense que, si divergence il y a eu, c'est au niveau personnel et qu'il en méconnaît les raisons. «Il ne s'agit point d'un désaveu du parti !» tient-il à préciser avant de souligner que l'actuel patron du FLN «est en concordance avec le Président, c'est bien lui qui claironnait le projet d'amendement de la constitution». Interrogé sur la tenue du conseil national et du congrès extraordinaire, Belayat estime que ce qui empêche que cela se fasse, c'est ce qu'il qualifie de «malformation congénitale». Et de préciser qu'il a été le premier, en janvier 2005 à la suite de la tenue du congrès rassembleur, à s'opposer au changement des dénominations du comité central et du bureau politique et de l'élargissement du premier (devenu conseil national) en 550 membres. «Si on ne fait pas attention, le parti va aller à la dérive !» avertit-il. M.C