Une ruelle en pente, qui ne paye pas de mine, dans un quartier dédié à la commercialité et aux bénéfices, Sidi Yahia. Dans cette ruelle, la galerie d'art Gaïa (Gaya ou Gê, la Terre mère, une déesse primordiale dans la mythologie grecque). Et accrochées aux cimaises de cette galerie les trente-huit œuvres qui composent l'exposition Iwan de l'artiste peintre mostaganémois Saïd Debladji. Six marches pour accéder à une minuscule terrasse (pour les fumeurs) et on entre dans l'espace d'exposition. Au premier coup d'œil, un regard d'ensemble relève la diversité des tons, formes, styles et techniques dans les œuvres, petits et moyens formats, exposées. Première halte, première peinture. Le signe et la lettre sont le sujet et le thème dans Manuscrit 1, qui disent dans les tons brun l'identité, qu'on retrouvera dans Manuscrit 2, 3 et 4, la Lettre, Sainteté. Mais avec Chant nocturne, Philtre et Amour on découvre un Debladji semi-figuratif, qui ne se gêne pas pour plaquer les plans et escamoter la perspective afin d'accentuer l'expression de ce corps désarticulé ou de ce visage torturé ! Le signe est toujours là, en marge, discret. Autres tons, autre style. Et on n'a pas fini de découvrir les talents de Debladji qui «ose» le choc des couleurs et des tons. Le résultat est tout simplement décoiffant. «Ce choc est voulu, pour croiser ce que la nature ne fait pas croiser et que l'art peut. Mais il y a aussi de la spontanéité dans ce croisement et chevauchement des couleurs…» dira l'artiste. Un pas et c'est tout autre chose qu'on découvre avec les silhouettes filiformes et les signes des six peintures de la série Danse en bleu sur fond blanc, qui se démarquent de l'ensemble des œuvres. La série suggère une nouvelle «période» du peintre. Il ne le démentira pas. «Je pense que je travaillerai encore sur cette série et qu'on en retrouvera dans mes futures expositions. Ça ne sera pas forcement une série, ça peut être une seule œuvre…» dira-t-il. Il faut espérer que Saïd Debladji pourra exposer à chaque fois qu'il en ressentira l'envie, lui comme tous les artistes, notamment ceux habitant en dehors de la capitale qui déjà a vu le nombre de ses galeries d'art se réduire de moitié et ne compte plus que quatre ou cinq espaces d'exposition digne de ce nom. Il est vrai que la responsable de la galerie d'art Gaïa, Mlle Hania Bougherbal, affiche d'emblée son intention d'ouvrir sa galerie à tous les nouveaux talents, voire que la galerie abrite l'exposition permanente d'un de ces artistes méconnus. Mais, quand bien même elle le voudrait, cette hirondelle ne pourra pas faire le printemps des artistes ni un marché de l'art. Et à voir les galeries d'art l'une après l'autre baisser le rideau et mettre la clé sous le paillasson, on ne peut qu'être conforté dans notre vision pessimiste… pour le futur proche du moins. H. G.