Enième empoignade entre le Sud et le Nord à Copenhague. Ce sommet mondial, tant attendu pour diminuer le péril global du changement climatique, tourne au bras de fer entre les principaux pollueurs et ceux qui en subissent directement les conséquences. Si les pays industrialisés insistent prioritairement sur les dangers du déboisement en enjoignant à leurs homologues du Sud l'ordre de préserver coûte que coûte les grands bassins forestiers, ces derniers s'accrochent mordicus au protocole de Kyoto sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre et réclament des compensations financières et matérielles pour la valorisation des forêts vierges. Chaque partie campe sur ses positions et la conférence risque sérieusement de s'achever sur de vagues promesses, comme les précédentes. Le monde entier s'attendait cette fois-ci à un engagement ferme des pays développés afin de modérer leur consommation frénétique en énergies polluantes en consentant des programmes d'aide conséquents au profit des pays du Sud qui font face à des impératifs de développement d'une extrême acuité. En effet, on ne peut contraindre les Etats pauvres qui se partagent les forêts du bassin du Congo et celles de l'Amazonie à faire fi des besoins urgents des populations locales pour protéger ces deux poumons qui permettent encore au monde de respirer. Evidemment, une telle œuvre est bien au-dessus des compétences et des capacités nationales en la matière, et exigent un effort multilatéral qui dépasserait la sphère environnementale proprement dite. Il s'agit essentiellement de partage et de partition équitables de la prospérité. Doit-on rappeler là-dessus les fameux Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) et les serments menteurs de la communauté internationale relatifs à la sécurité alimentaire et à l'aide promise aux pays pauvres pour reprendre avec la croissance économique et le bien-être social. Il est également inconcevable que les membres du G8 et les nations émergentes comme la Chine, l'Inde ou le Brésil puissent continuer leur course folle au contrôle des marchés au détriment des nations qui subissent de plein fouet les conséquences désastreuses du réchauffement climatique. Les pays africains et ceux d'Amérique latine, qui font front commun sur cette question fondamentale, ont établi la grande responsabilité des pays du Nord sur ce dossier et exigent à présent de légitimes réparations. Au lieu d'assumer le rôle qui devrait être le sien dans cette chaotique situation, le Nord industrialisé préfère la fuite en avant à travers «l'enterrement» du protocole de Kyoto qui prévoit une réduction de 5% des émissions de gaz à effet de serre en 2012 par rapport à leur niveau de 1990. L'Amérique de Barack Obama, fidèle à la ligne empruntée par celle de G. W. Bush, ignore royalement ce dispositif. Australiens et Japonais s'alignent sur la position de l'Oncle Sam. Les Européens refusent d'en faire, seuls, les frais. En somme, les riches veulent se débarrasser définitivement de cette initiative «encombrante» de Kyoto à travers l'hypocrite parade de la lutte contre la déforestation. «Les pays industrialisés voudraient que nous acceptions la mort du seul instrument existant qui les contraigne à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre», conclut Kamel Djemouaï, chef de la délégation algérienne à cette conférence de Copenhague. En se dérobant aussi hypocritement à leur devoir moral et historique, les pays développés engagent l'humanité tout entière sur la voie de l'incertitude et du danger. Ils en feront, eux aussi, les frais un jour. K. A.