La décision confédérale de suspendre le Togo des deux prochaines éditions de la Coupe d'Afrique nations de football (CAN) continue de faire des vagues dans les milieux sportifs du continent noir. L'arrêt sans appel de la commission exécutive de la CAF est jugé «arbitraire» par l'ensemble des footballeurs africains qui estiment que la sélection togolaise doit bénéficier de solides circonstances atténuantes dans les faits qui lui sont reprochés. Mitraillée à l'entame de la 27ème biennale du foot africain qui vient de s'achever en Angola, l'équipe du Togo, qui a perdu deux de ses membres dans l'attaque perpétrée par des rebelles du FLEC, a déclaré «forfait» dans des conditions extrêmement difficiles. Le président de la CAF avait promis, dans un premier temps, de respecter la décision qui serait prise par les camarades du capitaine Adebayor au sujet de leur participation ou non à ce rendez-vous. En effet, Issa Hayatou avait publiquement déclaré que les «Eperviers» ne risquent aucune sanction s'ils choisissent de quitter le tournoi après un tel massacre. Traumatisée et érieusement amoindrie après cet attentat barbare, la délégation togolaise avait naturellement opté pour le retour au bercail pour faire son deuil et panser ses blessures. Le choix de la non-participation était également celui du gouvernement togolais. Contre toute attente, la réunion de la commission exécutive de la CAF, intervenant à la fin du tournoi, a décidé de châtier sévèrement cette «défection» en infligeant au Togo une lourde peine de quatre ans de suspension des joutes africaines, assortie d'une amende de 50 000 dollars. Officiellement, la sanction était motivée par l'interférence de l'Etat dans le choix de la délégation endeuillée. L'argument ne convainc personne. D'aucuns estiment que la CAF avait réagi dès le début de cette affaire avec beaucoup de froideur et d'insensibilité. Loin de compatir à la douleur des Togolais, les responsables de la CAF et ceux du comité d'organisation se sont vite démarqués pour imputer toute la responsabilité du drame à la Fédération togolaise qui aurait dû, selon leurs dires, voyager par avion pour éviter de telles mésaventures. Tous les observateurs et tous les spécialistes du jeu à onze se disent aujourd'hui «surpris et scandalisés» par cette attitude incompréhensible et appellent la Confédération à faire machine arrière pour ne pas perdre le peu de crédibilité qui lui reste. Journalistes, critiques et footballeurs professionnels plaident pour l'annulation pure et simple de cette honteuse délibération qui condamne un pays affligé par un drame qui a failli coûter la vie à tous les membres de son équipe. Avertis préalablement de la menace d'attentat dans cette région frontalière, la CAF et le pays organisateur –l'Angola, en l'occurrence- n'ont pas pris les mesures nécessaires pour sécuriser le voyage des «Eperviers» du Togo. Bien avant l'ouverture de la compétition, les indépendantistes de l'enclave de Cabinda n'ont pas caché leur intention de chahuter «la kermesse». Des courriers menaçants ont été préalablement adressés aux deux parties qui ont manifestement sous-estimé le degré de nuisance des activistes du FLEC. Il y a, ensuite, le non-respect de la parole donnée par l'inamovible Issa Hayatou concernant la non-sanction de la sélection endeuillée si elle venait à quitter le tournoi. Pour de nombreux analystes, la sévérité du verdict sejustifierait par le manque à gagner en matière de recettes publicitaires engendré par le désistement de l'équipe du Togo. L'argent, qui ne manque d'ailleurs pas dans les caisses de la CAF, constitue l'unique mobile de cette fermeté sélective qui frappe aujourd'hui le Togo. L'équipe nationale d'Algérie, victime d'un traquenard tendu au beau milieu du Caire par les supporters des «Pharaons», attend toujours la bonne justice de l'instance présidée depuis 22 ans par le Camerounais Issa Hayatou. Domiciliée au Caire et complètement asservie aux intérêts exclusifs des Egyptiens, la CAF s'est compromise jusqu'au cou dans des histoires qui ne l'honorent pas. Tous les footballeurs africains sont aujourd'hui unanimes là-dessus. L'affaire du Togo est en quelque sorte la goutte qui fait déborder la coupe. K. A.