Photo : Riad Par Abderrahmane Semmar Taxi clandestin, un métier pas comme les autres. Naguère représentants d'un phénomène social qui ne concerne que les grandes villes, aujourd'hui les clandestins forment une activité parallèle qui ne cesse de croître. En en outre, ce ne sont plus seulement les chômeurs qui se rabattent sur ce «filon» pour ne plus flirter avec les murs de leur quartier. Ce sont aussi des fonctionnaires du secteur de l'éducation ou encore des personnes qui travaillent pour leur compte et qui, dans les moments libres, font du transport en «clando». En fait, il n'y a qu'un seul critère pour intégrer cette «profession», avoir son propre véhicule et évidemment son permis de conduire. Et pour travailler, il suffit juste de s'approprier des espaces de stationnement un peu partout dans la ville et en dehors du centre-ville. Ainsi, les «clandos» commencent leur travail généralement très tôt le matin ou en fin d'après-midi. Ces dernières années, ils assurent même le service nocturne. D'autre part, pour trouver la clientèle, ces «clando» ont leur astuce. Ils se font une réputation de transporteur de bouche-à-oreille. Ils proposent aussi leurs services sur la voie publique, un peu dans la discrétion. Mais pour les reconnaître, pas besoin d'être expert. Ils savent comment séduire le client. Certains ont même fidélisé leur clientèle qui a dû renoncer au service taxi pour faire toujours appel à eux en cas de besoin. Il va sans dire que cette «profession» attire de plus en plus les jeunes, qui gagnent nettement mieux leur vie. Certains d'entre eux ont carrément décidé de devenir des professionnels dans le transport à la fraude. Fateh, 25 ans, diplômé de l'université de Bab Ezzouar, a décidé de travailler comme clandestin depuis qu'il a acheté sa nouvelle voiture en recourant à un crédit bancaire. Auparavant, il avait bien cherché un boulot. Il passait des journées entières à dénicher les demandes d'emploi et préparer les envois de CV. Mais à chaque fois, on lui proposait un salaire dérisoire. «A quoi bon travailler dans une entreprise si on touche à peine plus que le SNMG ! C'est vraiment ridicule le travail dans ce pays. J'ai étudié durant des années pour gagner moins qu'une femme de ménage», explique notre jeune interlocuteur. Suite à ses expériences professionnelles amères, Fateh décide de devenir clando. «Je suis un clando, et un clando professionnel. J'ai des clients réguliers, des familles qui font appel à moi chaque semaine. Croyez-moi, je suis plus correct et affable que ces taxieurs indélicats avec les citoyens», témoigne-t-il en confiant qu'il se sent vraiment à l'aise dans cette profession où il n'a de compte à rendre à personne puisqu'il est son propre patron. «Ma voiture, c'est mon capital. Elle me permet de vivre mieux qu'un ingénieur dans une entreprise publique. Mon chiffre d'affaires évolue de mois en mois. Avec une voiture propre, un «clando», bon conducteur et fin connaisseur des routes à Alger, peut gagner vraiment sa vie», explique-t-il. Le business marche donc si bien pour Fateh qu'il s'apprête à rembourser son crédit auto dans pas très longtemps. «Deux ans m'ont suffi pour mettre de côté le montant du crédit au lieu des 5 ans habituels pour un salarié», reconnaît-il. Dans un contexte tel, Fateh ne manque pas de motivation pour maintenir son activité. Entre 7 h et 10 h, il est appelé chaque jour par ses fidèles clients pour les transporter jusqu'à leur lieu de travail. En fin d'après-midi, à partir de 17 h, les appels sont incessants. Le week-end, il écume les routes la nuit, et, pendant le Ramadhan, il se transforme en un «clando» nocturne. «Clando» et fier de l'être, Fateh se reven dique en tant que tel et dit être heureux grâce à sa profession. Il n'est vraiment pas près de changer d'activité.