«Ce qu'il y a de meilleur, c'est entre les trous», ironise un chauffeur de taxi en parlant des voies de communication urbaines, paraphrasant ainsi une célèbre publicité sur le gruyère. Et les routes qui sillonnent la ville de Annaba tiennent vraiment du gruyère avec les dizaines de nids-de-poule, de crevasses, de cratères et de trous béants qui les «décorent». En effet, les conducteurs sont obligés de slalomer entre ces «obstacles» d'un nouveau genre pour éviter que leurs véhicules ne soient endommagés et arriver à destination sains et saufs. Mais cela ne va pas sans quelques problèmes, puisque, en voulant contourner un trou au beau milieu de la chaussée, le chauffeur est obligé de freiner, de manœuvrer et ensuite de reprendre sa position. Cela ralentit la circulation, crée un encombrement et parfois provoque des accidents qui, fort heureusement, ne font que des dégâts matériels. Cela dissuade aussi les chauffeurs de taxi d'emmener des clients vers certaines destinations dont les chaussées sont défoncées. «Ce n'est pas pour 70 malheureux dinars que je vais risquer d'abîmer l'avant-train de ma voiture, la suspension et les amortisseurs ; je préfère ne pas y aller du tout, quitte à ne pas travailler et affronter les clients, poursuit le même chauffeur de taxi, il n'y a qu'à voir la cité Auzas, Oued Forcha El M'haffer ou les Allemands (cité Safsaf) pour comprendre ce que je dis.» En effet, toutes ces cités sont évitées par les taxis qui déposent le client, s'il accepte avant de monter, à quelques centaines de mètres de sa destination. A la cité Oued Forcha, un quartier où les villas cossues ont poussé ces dernières années, il n'y a presque plus de chaussées, ce sont plutôt des sentiers sur lesquels on a mis du tout-venant et juste une couche de gravier. En hiver, avec les pluies diluviennes, les alluvions charriées par les crues s'y déposent, des crevasses se forment et des flaques d'eau s'étendent un peu partout. En été, ce sont les poussières soulevées par les véhicules de passage, les véhicules des propriétaires de ces villas, qui pénètrent jusqu'à l'intérieur des maisons. Les résidants de cette cité se plaignent de cette situation et attendent depuis des années que leurs doléances soient prises en charge par les pouvoirs publics. Si on leur propose de reboucher eux-mêmes les trous et que cela ne coûterait presque rien s'ils cotisaient, ils vous rétorquent que, lors de l'achat des lots de terrain, ceux-ci étaient censés être viabilisés et que ce n'est pas le cas.A la cité Auzas, quartier hérité du temps de la colonisation, où les maisonnettes étroites se serrent les unes contre les autres, toutes les ruelles sont défoncées, les véhicules ne peuvent se croiser et il faut que l'un des deux se range sur le côté même en montant sur le semblant de trottoir pour que l'autre passe avec en «prime» le nid-de-poule que le véhicule ne peut éviter. Les inondations sont fréquentes et les habitants enlèvent leurs chaussures et retroussent leurs pantalons pour traverser d'un trottoir à l'autre. Il y a bien eu quelques travaux de réfection et de revêtement des chaussées ici et là mais cela demeure du rafistolage et du bricolage qui, en réalité, ne règle rien.