Une journée de la liberté d'expression et de la presse célébrée par tous sauf par la presse. Des partis, des associations et autres organismes se sont donné rendez-vous pour une communion à l'occasion du 3 mai, mais les journalistes se sont croisés ça et là pour couvrir la célébration d'une journée qui leur est dédiée. N'est-ce pas là le comble de l'ironie qui révèle l'ampleur de la division des rangs de la corporation. Cette situation est encore plus anachronique quand c'est le représentant des pouvoirs publics qui appelle les journalistes et les professionnels de la communication à s'auto-structurer pour défendre leurs intérêts matériels et moraux, à se doter d'une charte d'éthique et de déontologie et à prendre part aux débats pour l'enrichissement du projet de révision du code de l'information. Manifestement, la corporation des journalistes a définitivement opté pour une politique de l'autruche quand il s'agit des problèmes et des défis qui lui font face. Depuis la mort annoncée du MJA et la banqueroute de l'AJA quelques mois après son avènement en grande pompe, la corporation a baissé les bras. La création du SNJA et du SNJ n'ont rien changé à l'état de démission et de léthargie dans lequel s'est enfermée la presse. Pourtant, cette même presse s'évertue à donner des leçons d'organisation, d'action et de réflexion à d'autres secteurs qui se débattent dans des problèmes socioprofessionnels, à des courants politiques amorphes et désunis, à des syndicats du même secteur qui refusent de fédérer leurs efforts et leurs mouvements… le dicton populaire qui parle du dromadaire qui regarde la bosse de son congénère et oublie la sienne, s'applique parfaitement à la presse algérienne qui, il faut le reconnaître, reste très critique vis-à-vis de la situation dans laquelle elle s'est enfermée. Alors, pourquoi la corporation ne bouge-t-elle pas pour changer et décider de son sort ? Vingt ans après l'avènement du pluralisme médiatique, la presse algérienne est censée avoir atteint l'âge de raison pour être capable de se prendre en charge et agir pour sortir de son ronronnement et du cercle vicieux qui lui donne ou le vertige d'un pouvoir qu'elle n'a pas ou la nostalgie d'une époque révolue. Jusqu'à quand la presse algérienne restera-t-elle otage des clivages politiques éculés ? Pourtant, sous d'autres cieux, les clivages politiques et idéologiques sont plus prononcés mais n'ont jamais empêché les journalistes de s'organiser au sein d'un même syndicat, d'une même organisation, de se reconnaître tous dans la même charte d'éthique, de se retrouver et de discuter sans complaisance de leur métier, de leurs carrières, de célébrer ensemble leur journée du 3 mai, d'honorer ensemble leurs aînés, leurs plumes de l'année. Sous d'autres cieux, les journalistes ne se rencontrent pas uniquement pour enterrer un des leurs, mais aussi pour exprimer une solidarité sans faille au-delà des couleurs politiques et des tendances idéologiques. A. G.