Photo : Eiad Par Faouzia Ababsa Le ministère chargé des relations avec le Parlement a organisé hier un séminaire au cercle national militaire à Beni Messous. L'intitulé de la rencontre est d'une importante capitale en ce sens qu'elle a trait «aux exigences juridiques, politiques et morales du mandat électif». En somme, il s'agissait d'un débat sur le respect du mandat par l'élu et de sa responsabilité devant ses électeurs. Des communications d'éminents professeurs ont été données, à l'image de celles du Dr Cheriet et du Dr Seddouki, respectivement professeurs à l'Institut de droit de Constantine et à celui de Tizi Ouzou. Le moins qu'on puisse dire, c'est que le séminaire a été magistralement géré par le Dr Saïd Mokadem, qui a donné la preuve que les Algériens peuvent débattre en toute démocratie et sérénité, en toutes circonstances. C'est d'ailleurs cette satisfaction qui a été exprimée par Mahmoud Khoudri, ministre chargé des relations avec le Parlement, lequel a déclaré dans son discours d'ouverture que ce genre de rencontres se veut un espace «de dialogue, d'échange de points de vue et d'écoute des préoccupations des citoyens». Très peu d'élus, conviés à cette manifestation ont fait le déplacement. Cela dénote leur désintéressement de l'activité parlementaire mais aussi de toute la problématique liée au mandat et à son respect ainsi que de la relation de l'élu avec son électeur. Le débat était focalisé sur l'immunité parlementaire, l'impunité de l'élu national qui confond les deux concepts, le «nomadisme» politique, l'incompatibilité du mandat électif avec d'autres fonctions, la non-déclaration du patrimoine, mais surtout la corruption, l'achat des voix, le pouvoir de l'argent par le biais de l'entrée au Parlement d'hommes d'affaires ayant blanchi de l'argent sale. Le Dr Chihoub, député et ex-professeur à l'université de Constantine, a déclaré avoir recensé au moins 10 références aux lois organiques contenues dans la Constitution algérienne. Mais aucune d'elles pour le moment n'a été promulguée. Ces références sont liées justement à l'incompatibilité du mandat électif avec d'autres fonctions, la démission, la déchéance. Il a, d'autre part, souligné que les lois existantes ne sont pas mises en application, à l'image de celle sur la déclaration de patrimoine consacrée par l'ordonnance de janvier 1997. L'intervenant a dit craindre pour les prochaines élections que ce soit l'argent qui prenne le dessus. Aussi, selon lui, il faut «impérativement la loi électorale et celle sur les partis politiques, en durcissant les conditions de candidature et en intégrant certains principes d'éthique politique». Lui emboîtant le pas, Louisa Hanoune évoquera l'absence d'enquête de probité sur les candidats, qui relève de la responsabilité fondamentale des partis politiques. Et comme la question du nomadisme politique et le respect du mandat font partie de ses chevaux de bataille, la secrétaire générale du Parti des travailleurs n'hésitera pas à parler de décomposition politique. Elle donnera même l'exemple d'un représentant de multinationale qui a trouvé le moyen de gravir les échelons en se retrouvant député, membre du bureau de la chambre basse du Parlement, avant de se voir propulser au Sénat. Elle dénoncera l'augmentation faramineuse des salaires des parlementaires, dont certains n'ont jamais pris la parole dans l'hémicycle, «jamais proposé d'amendements ou encore pris part aux travaux des commissions». Elle ira plus loin en accusant certains de ses collègues d'utiliser l'immunité dont ils jouissent pour des passe-droits et même pour agresser des gendarmes, des fonctionnaires en toute impunité. «L'immunité ne signifie pas l'impunité», dira-t-elle. Les lobbys et le pouvoir de l'argent se sont taillé la part du lion lors de ce séminaire auquel ont pris part des élèves magistrats, des étudiants de l'Ecole nationale d'administration, des étudiants en sciences politiques et des fonctionnaires . Un séminaire qui vient à point nommé, dès lors que, de l'avis de tous, la scène politique algérienne vit un pourrissement qui influe directement sur tout le reste et entraîne justement l'immoralité dans l'ensemble des institutions. Moraliser la vie politique demeure donc un objectif.