Photo : S. Zoheïr Par Ziad Abdelhadi Les dangers de la contamination de produits alimentaires sont beaucoup plus mis en évidence dans les souks hebdomadaires où des centaines de familles s'approvisionnent en vivres de tous genres. Les règles élémentaires d'hygiène et le respect de la chaîne du froid sont carrément ignorés. De véritables épiceries sont érigées en plein air, avec des étals de fortune, sans pour autant que les propriétaires se soucient de mettre leurs produits à l'abri des rayons du soleil. En se rapprochant un peu plus, on remarque que les dates de péremption inscrites sont très proches. Pis, il est devenu courant que des bouchers occasionnels vous proposent des quartiers de viande provenant d'ovins, de bovins ou de caprins fraîchement abattus près des lieux sans pour autant que l'on sache si la bête était saine. La chaleur aidant, les mouches n'en sont que plus attirées. Là, parler de contrôle vétérinaire relève plus de l'imaginaire. Les critères de microbiologie sont la plupart du temps non remplis dès lors que le contrôle au préalable n'est pas effectué. En ce qui concerne les fruits et légumes, il y a également à redire. Des produits à la limite du pourrissement sont proposés à la vente. Des fruits avariés sont exposés à la vente. Leur propriétaire, peu scrupuleux, espère en tirer quelques dinars avant de se résigner à les jeter. C'est pour dire qu'en ces lieux, les vendeurs occasionnels ont pour devise de tenter de fourguer leurs produits impropres à la consommation à des personnes cherchant plutôt à se ravitailler à moindre coût, reléguant au second plan le critère qualité du légume ou fruit acheté. Il faut reconnaître que beaucoup de citoyens, en raison de la faiblesse de leur pouvoir d'achat, sont obligés de rechercher les prix les plus bas, se rabattant ainsi sur les produits de mauvaise qualité ou ceux dont la date de péremption est proche. Autant dire que les familles à faible revenu font les beaux jours des vendeurs sans scrupules et peu enclins à s'inquiéter du degré de nocivité de leurs produits et qui plus est impropres à la consommation. Mais toujours est-il qu'on est en droit de se demander où réside la part de responsabilité dans le cas où des produits douteux sont proposés à la vente : chez le vendeur où l'acheteur ? Mission de contrôle à plusieurs niveaux d'intervention Du côté des services de contrôle de la qualité, relevant du ministère du Commerce, on avance qu'il est matériellement impossible de contrôler tous les produits alimentaires mis en vente. Il existe 1,2 million de commerçants en activité au niveau national et 19 laboratoires de contrôle de produits alimentaires, soit un contrôleur pour 300 commerçants. Cela dit, le premier contrôleur et premier rempart de surveillance reste, bien sûr, le consommateur car il en est la victime tout indiquée. Un meilleur contrôle des produits alimentaires permettrait d'éviter beaucoup d'intoxications. Et sur ce registre, c'est bien en été que les risques se manifestent le plus, d'où une vigilance plus accrue. Cela est d'autant plus recommandé si l'on se réfère aux dernières statistiques officielles en matière d'intoxications alimentaires : on est passé de 900 cas en 1990 à près de 4 500 en 2007 à l'échelle nationale. En ce qui concerne les causes, la direction de la santé publique auprès du ministère de la Santé fait savoir que la majorité des intoxications relevées sont dues aux pâtisseries avec un taux de 50%, aux viandes rouges (30%), aux viandes blanches et aux yaourts. Ainsi, les grands foyers à risque se retrouvent chez les pâtissiers et les bouchers. En ce qui concerne la première catégorie professionnelle, les services de contrôle peuvent intervenir tout de suite et ordonner la fermeture pure et simple de l'établissement coupable d'intoxication, mais quand il s'agit de la seconde catégorie professionnelle, le ou les contrevenants sont difficiles à localiser car se sont le plus souvent des vendeurs occasionnels. En ce qui concerne les intoxications à partir de la consommation de viande avariée, on notera que, souvent, elles interviennent dans les mariages ou autres fêtes familiales quand le produit carné fait l'objet d'un long déplacement sans respect des conditions de conservation requises. La viande rouge ou blanche, comme l'ont souligné des vétérinaires, est un produit très sensible, particulièrement en d'été où sa conservation à basse température est impérative. Citant les merguez traditionnelles, un produit carné très prisé par les consommateurs, nos interlocuteurs signaleront que leur durée de vie réglementaire est de 8 heures, c'est-à-dire qu'il faut les consommer le jour même de leur fabrication. De plus, «au-delà de 100 kg de production, cela devient un risque d'intoxication permanent. N'importe quel artisan peut prétendre fabriquer une merguez traditionnelle. D'où viennent les boyaux ? Qui peut prouver qu'ils sont naturels ou traités, qu'ils proviennent d'ovins ou de bovins ou d'autre chose ?». En définitive, il devient impératif d'initier les consommateurs à une plus grande vigilance quant aux denrées alimentaires qu'ils achètent. Garantir l'hygiène des produits de consommation à toutes les étapes de la production, de la transformation et de la distribution n'est pas une mince affaire, ce qui demande la contribution de tout un chacun : les pouvoirs publics, les producteurs, les détaillants et particulièrement les consommateurs d'autant que les risques d'intoxication alimentaire sont fréquents en cette période de l'année.