à plus d'une heure de la fin du match Algérie-Slovénie, les Algériens sont restés sans voix. Depuis la matinée, les rues de la capitale étaient presque désertes. Le peuple retenait son souffle et attendait le déclic pour faire exploser sa joie désormais réputée, d'après-match. Mais, la défaite de leur équipe nationale lors de sa première prestation en Coupe du monde 2010 a gâché la fête. «Je me suis préparé depuis plus d'une semaine pour défiler. J'ai même équipé ma voiture d'une sono explosive. Mais, aujourd'hui, je suis très déçu», déplore un jeune Algérois. Rarement un sentiment peut être perçu à l'œil nu ; hier, la frustration des supporters algériens était visible. Tête baissée, silencieux et mine déconfite, les Algérois semblaient touchés par une déprime collective. «On avait la victoire entre les mains. On a dominé la rencontre. Les Verts n'ont toujours pas réglé les erreurs du passé. C'est la nervosité et l'inefficacité de l'attaque qui les perdent, et, puis, bien sûr, les choix tactiques frileux», peste un autre fervent supporter des Verts. Dans une ambiance morose, un calme pesant et une atmosphère lourde, quelques personnes restent scotchées devant un écran de télévision installé au niveau d'une terrasse de café. Suspendues aux lèvres des experts en football, elles semblent obnubilées par le besoin de comprendre. A l'affût de la moindre parole susceptible de leur donner une raison d'espérer encore. Dans ce petit pan de supporters, trois tendances se dégagent, à en juger par les interventions des uns et des autres en réponse aux intervenants du plateau télévisé. La première, largement majoritaire, est la bande de la désillusion et de «l'avenir sombre pour l'EN». Son argument est que si l'équipe algérienne a perdu face à la Slovénie, estampillée plus faible équipe du groupe C, les Verts garderont la dernière place. «On va se ramasser face à l'Angleterre et aux Etats-Unis. Je ne regarderai pas ces rencontres», annonce d'ores et déjà le meneur de ce groupe. La seconde tendance est celle des «relativistes». «Ils nous ont fait peur pendant les matches de préparation. Aujourd'hui, les joueurs ont présenté un beau jeu, c'est largement suffisant pour les encourager davantage. Et puis, on ne s'attend pas à ce que l'Algérie remporte la Coupe du monde», argue celui qui porte haut, par le verbe, le raisonnement de cette «école». «Et puis, il ne faut pas oublier que nos joueurs sont jeunes. Ils ont un bel avenir devant eux», poursuit le téméraire. La troisième et dernière école est celle des «optimistes jusqu'à épuisement». Très minoritaires, ses adeptes appuient leur raisonnement sur les spécificités du sport roi. Avec force références, ils soutiennent mordicus que dans un match de football rien n'est scellé avant le coup de sifflet final. «Il n'y a pas de grande ni de petite équipe en football. Sinon rien ne sert de jouer. C'est cela la magie du foot», hurle fort un fan des Verts bariolé aux couleurs nationales. «Les verts aiment les défis. Je vous parie mon salaire qu'ils feront une très bonne prestation face aux Anglais et qu'ils battront les Etats-Unis», insiste-t-il devant les yeux médusés et amusés des autres téléspectateurs. Les esprits s'échauffent et les arguments s'entrechoquent, mais plus loin dans la rue, l'ambiance reste toujours morose. Alger, envoûtée par les vuvuzelas, cuve la défaite de son équipe. S. A.